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Stratégie perdante pour Al Qaeda au Yémen

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Enfin une « bonne nouvelle » ! L’armée yéménite a repris la ville de Shaqra des mains des combattants de l’AQPA (Al Qaeda Péninsule Arabique). L’offensive yéménite, soutenue par l’armée américaine (grâce à un soutien logistique et par des frappes de drones), est pour l’instant couronnée de succès, puisque Shaqra est la troisième ville reprise ces derniers jours par l’armée régulière (après les bastions de Zinjibar et Jaar).

L’AQPA a tenté une stratégie inédite au Yémen : agir à visage découvert, en contrôlant des territoires et en affirmant une implantation géographique forte. Cette stratégie présentait un avantage majeur : empêcher les autorités de contre-attaquer avec vigueur. En effet, les populations civiles servent de bouclier humain : attaquer les territoires contrôlés par Al Qaeda dans le Sud, ce serait re-déclencher la guerre civile Nord/Sud au Yémen. Ce que le président Hadi, élu démocratiquement en février (après 33 ans de pouvoir personnel du président Saleh) ne peut se permettre.

Comment alors expliquer la réussite actuelle de sa contre-offensive ? L’intelligence politique du nouveau président a vraisemblablement été déterminante.

Il a en effet réussi à réunir l’ensemble des forces « modérées » du pays pour combattre les autres. Nombre d’anciens partisans du dictateur Saleh, en force dans l’armée, le suivent, car Hadi a été son vice-président. Les indépendantistes « modérés » du Sud le soutiennent également, à la fois car il incarne la détente après l’intransigeance de Saleh et car ils refusent un Sud aux mains des forces exogènes d’Al Qaeda. Cette coalition réalisée, le risque que la guerre contre Al Qaeda soit assimilée à une nouvelle guerre Nord/Sud s’amenuise.

Le président Hadi a également réussi (pour combien de temps ?) à reprendre la main sur son armée. Cette dernière était gangrénée par une logique purement tribale, les soldats ayant tendance à ne suivre que leur officier le plus proche, issu de la même tribu qu’eux. D’où un manque de contrôle de l’armée, fortement dispersée, désunie et corrompue. A situation d’urgence, mesure de court terme. Au lieu de combattre la logique tribale, le président Hadi l’a acceptée. Il a convaincu les tribus, et donc les régiments qui en sont issus, à tel point que des milices tribales se battent aux côtés des troupes régulières.

Une fois le blocage politique dépassé et l’armée disciplinée, Al Qaeda n’a plus beaucoup de chances. Ses militants sont des guérilleros, pas des soldats. Ils sont efficaces pour faire le coup de main, pas pour défendre un territoire. La nouvelle stratégie de l’AQPA au Yémen l’a mis à découvert, et le groupe terroriste le paye au prix fort. Ce qui n’était pas joué d’avance.

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