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Crise turque : la perte du dernier allié modéré de Damas ?

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Depuis que la Syrie a abattu un F4 Phantom turc le 22 juin dernier alors que ce dernier effectuait une mission d’entraînement au-dessus des eaux internationales, le torchon brule entre Ankara et Dama. Si la situation était déjà tendue, l’événement balaie tout projet de réconciliation à court terme.

Pourtant les relations entre les deux pays avant la crise politique en Syrie avait bien commencé : il y a plus d’un an la situation actuelle serait passé pour un scénario absurde. En effet  les liens économiques et politiques entre la Turquie et la Syrie se renforçaient, et comme le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan aimait à le rappeler, il avait grandi si près des Assad qu’ils faisaient désormais partie de sa famille. Mais la famille est devenue encombrante et depuis que Bachard al-Asaad a rejeté les appels d’Erdogan à cesser de tirer sur son peuple, les liens se sont rompus. La destruction de l’avion de chasse à 13 miles nautiques de la Syrie (alors que l’espace syrien commence à 12 miles) a achevé de faire empirer la situation alors que Turquie a fait de nombreuses allusions sur une possible intervention militaire. Si tous les medias turcs ont réagi à l’événement, le pays n’a cependant pas l’intention d’agir militairement en Syrie.

Erdogan n’a cependant pas l’intention de se laisser faire et a promis de répondre « de la manière la plus forte » à tout acte hostile. En cela il est aidé par le fait que la Turquie appartienne à l’OTAN et que l’organisation ait rapidement réagit. Tous ces membres ont fermement condamné l’agression et ont tenu une réunion extraordinaire à Bruxelles pour faire le point. La Turquie n’a pour autant pas brandi le fameux article 5 du traité de l’OTAN qui impose la solidarité de tous les membres lors de l’agression d’un seul d’entre eux. A cela deux raisons : la première est qu’aucun de ses alliés ne souhaite s’empêtrer dans un conflit en Syrie et surtout pas les américains qui sont à quelques mois d’une élection cruciale. La deuxième est que la Turquie elle-même a ses raisons pour ne pas intervenir : d’abord l’opinion publique est contre l‘idée d’une guerre, ensuite son armée est déjà empêtrée dans la lutte armée contre le PKK (le parti indépendantiste kurde) depuis 28 ans.

Cela n’a pas empêché la Turquie d’appeler à un changement de régime en Syrie ni d’héberger l’opposition syrienne dont le chef de l’armée syrienne libre, le colonel Riad al-Asaad. Mais les événements récents ont mis à mal la dernière stratégie politique turque.

En effet, la Turquie voulait se positionner comme un interlocuteur diplomatique et politique majeur dans la région. Or les changements de gouvernements provoqués par le Printemps arabe et son immobilisme face à la crise syrienne sapent jusqu’aux fondements cette initiative. La Turquie connaîtra-t-elle une révolution de sa politique extérieure après cet épisode ? Il est plus probable qu’elle tentera de s’imposer partout où elle le peut. Difficile pour un pays pratiquant la laïcité dans un fort contexte d’islam politique.

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