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Mali : des élections et après?

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Le 3 septembre, Ibrahim Boubacar Keïta (dit « IBK »), nouveau Président du Mali est officiellement entré en fonctions. Elu en août avec 77,61% des voix, il jouit d’emblée une forte légitimité, appuyée par la reconnaissance immédiate de sa défaite par son opposant Soumaïla Cissé. Première étape de la reconstruction du pays, ces élections réussies, notamment du point de vue organisationnel, laissent désormais place à de nombreux défis.

Porté au pouvoir afin de stabiliser cet Etat déliquescent et de garantir son unité, la reconstruction des institutions, et notamment de l’armée, ainsi qu’une lutte contre la corruption constitueront la base de l’action d’IBK. Les 3 milliards d’euros promis par la communauté internationale afin de relancer l’économie s’ils peuvent permettre la mise en place de projets de développement et la reconstruction de l’Etat, font néanmoins craindre leur détournement dans les circuits de la corruption.

En termes politiques, IBK devra composer avec les différentes forces en présence malgré son rejet de la possibilité d’un gouvernement d’union nationale. Le soutien de l’armée et de plusieurs dignitaires religieux font craindre la soumission du pouvoir à des intérêts particuliers, remettant en cause ses marges de manœuvres et sa laïcité. C’est aussi une nouvelle relation avec la France qui devra être définie. Appelée au secours en 2012 – rappelant les liens anciens entre les deux pays et les hautes heures de la « Françafrique »-, la France sera soucieuse de garantir la stabilisation à long terme du pays avec plus de 3000 soldats encore sur le terrain, faisant craindre une ingérence à moyen terme.

La question touareg : au centre de la reconstruction du pays

La définition d’un nouveau contrat social et politique avec la population touareg du nord du pays est enfin cruciale pour la stabilité du pays. Les accords signés à Ouagadougou le 18 juin avec le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) et le Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) ont permis de fixer un cadre de négociation. Le nouveau Président dispose de 60 jours afin d’engager une discussion sur le statut du nord du pays. Cela rappelle à plusieurs égards les vaines tentatives de réponse aux aspirations touaregs auxquelles le pays fait face depuis son indépendance, tels que les accords signés à Tamanrasset en 1990, à Alger en 2006, ou encore le pacte national de 1991. La présence de l’armée française et de casques bleus fait espérer une plus grande effectivité à ces accords.

IBK a néanmoins fait valoir qu’ils ne l’engageaient que partiellement, et  voit dans une amélioration de la décentralisation, préconisée par les bailleurs de fonds, une solution. Loin de satisfaire les attentes des touaregs, pour qui la crise récente a mis en exergue la particularité de leur statut et leur besoin de statut spécifique, cette solution est approuvée par les populations du sud, défavorables à des concessions trop larges faites à celles du nord. A travers la question touareg, c’est le besoin de dialogue et de réconciliation nationale qui transparaît, à même de garantir au Président la conservation de la légitimité nécessaire à la reconstruction du pays.

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