Proche et Moyen-Orient

L’Iran : le pivot américain au Moyen-Orient ?

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Nous avions vu dans un article récent le rôle clé qu’allait sans doute jouer l’Iran dans la résolution de la crise irakienne. L’Iran est donc progressivement en train de faire son retour dans le concert des nations, aussi bien sur la scène régionale qu’internationale. Un basculement géopolitique que les américains commencent à anticiper.

Le 24 Novembre dernier, le groupe de négociation des « 5+1 » avait débouché sur un accord qualifié d’historique sur le nucléaire iranien. Après les années au pouvoir d’Ahmadinejad qui affichait une hostilité ouverte envers l’Occident, le plus pragmatique président Rohani compte bien renouer le dialogue afin de lever les sanctions qui étouffent l’économie iranienne. Cet accord avait déjà été critiqué par Israël et l’Arabie Saoudite. Aujourd’hui, le fait que les Etats-Unis et l’Iran envisagent plus ou moins officiellement de coopérer pour lutter contre l’Etat Islamique en Irak et au Levant (EIIL) ne fait que renforcer leurs suspicions à l’égard du rapprochement prochain entre Téhéran et Washington.

En effet, on peut identifier quatre éléments importants qui peuvent pousser Washington à opérer un basculement d’alliance en faveur de la République Islamique d’Iran dans les années à venir :
– Le désengagement progressif du Moyen-Orient et le pivot asiatique obligeant Washington à se trouver des alliés stables et influents dans un ensemble régional complexe et agité.
– Une nouvelle politique énergétique qui fera des Etats-Unis le premier producteur de pétrole à l’horizon 2020, les rendant beaucoup moins dépendants de l’approvisionnement en provenance du Moyen-Orient dont l’Arabie Saoudite.
– La prise de conscience de l’alliance à double tranchant avec les monarchies du Golfe, qui participent à la déstabilisation du Maghreb et du Moyen-Orient en finançant et armant de nombreux groupes terroristes jihadistes.
– Les atouts propres à l’Iran : pays clé au niveau géopolitique au vue de sa position, disposant des deuxièmes ressources en gaz et des troisièmes ressources en pétrole de la planète, fort d’une population éduquée représentant un marché de près de 80 millions de consommateurs.

Néanmoins, cette alliance soulève encore bien des oppositions au sein des deux pays. Chacune des administrations nationales restent méfiantes l’une de l’autre. Toutefois, la levée des sanctions économiques sur l’Iran est considérée comme proche pour beaucoup, poussant les entreprises américaines à préparer la réouverture du marché iranien aux investissements étrangers.

Sur la scène régionale, Israël se montre de plus en plus critique de l’administration américaine tandis que l’Arabie Saoudite prend désormais souvent des mesures à l’encontre de la volonté de Washington (soutien affiché au maréchal Al-Sissi en Egypte ; armement des rebelles syriens). L’Iran continue pour sa part à traiter également avec d’autres grandes puissances, comme la Russie et la Chine, qui ont toujours été plus enclines à son égard ces dernières années.

La manière dont se clôtureront les accords sur le nucléaire en Juillet sera un signe important sur le retour ou non de l’Iran dans le concert des nations. Toutefois ce retour parait de plus en plus inéluctable, obligeant Washington à préparer le terrain et anticiper ce basculement géopolitique, quitte à froisser ses alliés traditionnels au Moyen-Orient.

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