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Le yuan : future monnaie de référence ?

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Le jeudi 10 octobre dernier, la Banque Populaire de Chine (BPoC) et la Banque Centrale Européenne (BCE) ont signé un accord d’échange de devises qui devrait permettre de faciliter les échanges commerciaux entre l’Europe et la Chine. Cet accord d’échange (« swap » en anglais)  atteste une fois de plus de la prise d’importance de la monnaie chinoise dans les transactions internationales.

Le yuan (ou renminbi) supplantera-t-il un jour l’indétrônable billet vert américain dans les échanges internationaux ? La question, si elle reste encore aujourd’hui sans réponse, mérite  néanmoins d’être posée.

Les accords signés entre la BPoC et la BCE permettront aux banques européennes d’accéder à 350 milliards de renminbis (soit environ 42 milliards d’euros), et aux banques chinoises, à 45 milliards d’euros. Ces mesures « swap » entre banques centrales, à l’initiative de la BPoC se multiplient depuis quelques années (avec l’Australie, la Corée du Sud, le Brésil mais également le Japon ou la Grande-Bretagne) si bien que le yuan est entré récemment dans le cercle très fermé des huit devises les plus échangées au monde.

Mais ce n’est pas tout : depuis le 29 septembre,  le yuan est entièrement convertible dans la nouvelle zone franche de Shanghai, preuve que le gouvernement chinois est désormais fermement décidé à accélérer la libéralisation des marchés financiers. Depuis 2009 déjà, la Chine évoque l’intention de d’intégrer le yuan dans un panier de monnaies, dirigé par le FMI, qui remplacerait le dollar comme monnaie de réserve mondiale. Plus encore, le gouvernement chinois a autorisé en 2010, l’utilisation du renminbi dans le paiement des importations et des exportations. Conséquence, près de 20% des échanges extérieurs chinois sont aujourd’hui libellés en yuan, une proportion qui devrait grimper à 30% d’ici quelques années.

Toutes ces mesures s’inscrivent dans un objectif commun : mettre un terme à l’hégémonie du billet vert dans les transactions internationales.

Les nombreux avantages économiques* que la Chine pourrait tirer d’une position de leadership en la matière motivent les autorités chinoises. De ce fait, les relations sont de plus en plus tendues avec  les Américains : ceux-ci accusent la Chine de pratiques économiques déloyales en dépréciant la valeur du yuan afin de rendre leurs produits plus attractifs. Mais Washington marche sur des œufs : la Chine détient une arme de poids dans la balance puisqu’elle possède aujourd’hui dans ses réserves près de 2 500 milliards de dollars, dont 40% en bons du Trésor et en bons d’agences fédérales américaines. Qu’elle décide de les vendre, et le dollar s’écroulerait presque instantanément.

Les ambitions chinoises sont-elles donc réalisables ?  A l’heure actuelle, malgré les efforts de la BPoC, le yuan ne représente que 1% des transactions financières internationales. Et si les investisseurs étrangers sont de plus en plus nombreux, les législations chinoises contraignantes (licence de gouvernement obligatoire pour investir en Bourse, plafonnement des investissements…) ou le manque de confiance des investisseurs potentiels freinent encore la pénétration des marchés chinois. La route vers un leadership du yuan reste finalement bien longue, d’autant que les Etats-Unis ne consentiront pas de sitôt à concéder leur première place.

 

*Le pays émetteur de la monnaie de référence facture notamment le droit de création de sa monnaie, commerce avec sa monnaie et s’endette (s’il y a lieu) avec sa monnaie. En définitive c’est le pays émetteur de la monnaie de référence qui fixe les grandes lignes de la finance mondiale.

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