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Campagne anti-corruption en Chine : le dragon se mord-il la queue ?

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A la fin de son mandat, l’ancien président chinois Hu Jintao avait dénoncé le fléau de la corruption qui dévorait la Chine, estimant même qu’elle pourrait s’avérer « fatale pour le parti et l’Etat ». Un problème que son successeur, Xi Jinping, a choisi comme cheval de bataille.

Une caricature traitant de la corruption dans l'Empire du Milieu
Une caricature traitant de la corruption dans l’Empire du Milieu

Les vastes problèmes de corruption ne sont pas nouveaux en Chine. Toutefois la dégradation de la croissance masque de moins en moins les coûts macroéconomiques de la corruption. La population chinoise est désormais beaucoup plus sensible à ce sujet qui touche l’ensemble des bureaucrates du Parti Communiste Chinois (PCC). Depuis l’ouverture au commerce mondial à la fin des années 70, la corruption a gangréné les élites politiques chinoises avec l’envol de l’économie.

En effet, les chiffres de la corruption sont éloquents. La Banque de Chine a calculé qu’en 2011, sur les vingt dernières années, près de 18.000 cadres ont fait défection emportant avec eux à l’étranger l’équivalent de près de 90 milliards d’euros (phénomène des « fonctionnaires nus »). En 2013, 180.000 cadres du PCC ont été arrêtés lors de la campagne, dont une trentaine de très hauts dignitaires du Parti. C’est pourquoi aujourd’hui, les 85 millions de membres du PCC sont sous tension : Xi Jinping mène son combat contre les « tigres et les mouches », c’est-à-dire aussi bien les hauts dignitaires que les petits cadres du PCC.

Effet d’annonce ou réel combat contre la corruption ?

De nombreux dirigeants chinois ont voulu ces dernières années combattre la corruption, sans réelles avancées. Toutefois, ces deux dernières années, notamment depuis l’affaire Bo Xilaï, la Chine est à un tournant en matière de lutte contre la corruption. Aucun des 85 millions de membres du Parti n’est à l’abri du « Shuanggui » : une procédure de discipline interne au parti aux méthodes violentes. La récente chute de de Zhou Yongkang, ancien grand chef de la sécurité en Chine et membre du comité permanent du Politburo, a prouvé qu’aucun n’était à l’abri, pas mêmes les princes rouges.

Toutefois, cette campagne de lutte peut être interprétée de différentes façons. Certains y voient un moyen pour Xi Jinping de renforcer son clan au pouvoir. Sous couvert de lutte contre la corruption, cela lui permet d’éliminer ses ennemis politiques pour imposer sa ligne. D’autres sont sceptiques sur les effets de cette lutte sans réformes structurelles. Le monopole politique du PCC entraînant le monopole économique, la corruption se développe facilement d’autant plus qu’il n’y aucun pouvoir indépendant ni de parti d’opposition. De surcroit, l’Etat accaparant tous les impôts locaux, les barons de province sont tentés pour s’enrichir comme les hauts-cadres du Parti d’user de leur pouvoir pour faire du clientélisme, notamment dans le foncier.

Ce qui est certain, c’est que l’attitude volontariste de la Commission centrale pour l’inspection disciplinaire du PCC a déjà modifié les comportements. La chute des ventes de l’industrie du luxe (particulièrement les montres, la haute couture et le cognac) montre bien que les membres du Parti ont désormais plus le goût de la discrétion que de l’ostentatoire dans ce contexte de vague d’arrestations.

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