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Le malentendu ukrainien

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Les élections législatives du 23 octobre dernier ont vu les partis pro-européens faire la course largement en tête en Ukraine. Ce résultat assez net laisse pourtant planer de nombreuses ambigüités quant aux orientations géopolitiques futures de l’Etat ukrainien. Des ambigüités qui ne sont pas seulement dues aux divisions des dirigeants ukrainiens…

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Le premier ministre ukrainien, Arseni Iatseniouk, porteur d’une très grande fermeté avec la Russie et d’une ouverture forte à l’Occident.

Avec plus de 50% des suffrages, les partis pro-européens sortent largement vainqueurs du dernier scrutin. Il place le Front populaire du Premier ministre Arseni Iasteniouk en tête avec 22% des voix, devançant de très peu le parti du Président Porochenko qui récolte 21% des suffrages. Toutefois, le système électoral ukrainien, très complexe, place le parti du Président très en tête au nombre de sièges à la Rada (132 contre 82).

Ce succès unanime des pro-européens est toutefois à relativiser tant les divisions sous-jacentes de ces deux grandes formations notamment sont importantes. Ce n’est pas pour rien que le Premier ministre Iatseniouk a présenté une liste concurrente à celle du Président Porochenko. Leurs programmes sont en réalité bien différents, malgré ce que l’on pourrait croire en y regardant rapidement.

Le succès d’Iatseniouk est très certainement dû à la radicalisation de ses positions pro-européennes. Il souhaite non seulement un rapprochement poussé avec l’UE (il a mené avec succès les accords de partenariat de mars 2014), mais affirme aussi clairement sa volonté d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, adhésion sur laquelle Porochenko est lui très réservé. Surtout, il défend une ligne des plus fermes envers la Russie et souhaite la fin des cessez-le-feu avec les séparatistes du Donbass. Là aussi, le décalage avec Porochenko est très net : le Président vient de reprendre les relations diplomatiques avec Poutine et semble négocier une sortie de crise.

Malgré ces désaccords fondamentaux, Iatseniouk devrait d’ici peu être reconduit comme Premier ministre par le Président Porochenko. Il y a c’est vrai un terrain d’entente clair sur certains sujets : les deux grands partis souhaitent une Ukraine démocratique, ouverte sur l’Occident et dotée d’une économie moderne. Il semble donc y avoir une réelle attente du peuple ukrainien d’un rapprochement avec l’Europe.

Une Europe très (trop ?) prudente

Mais le drame qui se joue est que cette attente est loin d’être partagée de l’autre côté ! Depuis longtemps déjà, l’Europe, et l’Occident de manière générale, sont très clairs avec Kiev sur trois sujets centraux.

D’une part, c’est le point le plus récent, il est hors de question d’envisager une intervention militaire dans l’est du pays. D’autre part, l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN est exclue. Contrairement à ce qu’affirme Poutine, ce ne sont pas les Européens qui ont un temps incité l’Ukraine à rejoindre l’alliance occidentale mais les Etats-Unis, au crépuscule de l’administration Bush en 2008. Ce projet a été clairement rejeté depuis (veto français et allemand notamment) et le dernier sommet de l’OTAN à Newport, s’il prévoyait une aide à l’Ukraine n’envisageait même pas une telle adhésion. Enfin, et surtout, il n’est absolument pas question d’une entrée de l’Ukraine dans l’Union Européenne, ce qui était très clair dans les négociations récentes.

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