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La France au défi du terrorisme (1/2)

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Mercredi 20 avril 2016, l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) recevait Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, pour une conférence sur les défis du terrorisme.

Comment la France pourrait-elle lutter plus efficacement contre les réseaux terroristes ?
Comment la France pourrait-elle lutter plus efficacement contre les réseaux terroristes ?

Bernard Cazeneuve commence son intervention par le rappel de la dégradation de la situation géostratégique dans le voisinage de l’Europe. En effet, l’Irak et la Syrie connaissent la guerre, la Libye est la proie d’organisations mafieuses à la tête des trafics d’armes, de stupéfiants et d’êtres humains. Désormais, des individus européens vont en Libye via les réseaux de Daech et certains vont de Syrie vers la Libye. Des commandos terroristes se fondent dans les flux de migrants. Les groupes armés terroristes qui parcourent la bande sahélienne constituent un risque sécuritaire pour les pays locaux mais aussi pour les intérêts occidentaux et français. Le contexte est donc très difficile aux abords de l’Europe et appelle des mesures à l’échelle européenne.

A l’échelle de la France aujourd’hui, le niveau de menace est au moins aussi élevé que lors du 13 novembre 2015. Quelle est la menace ? Les individus sont partis pour certains depuis plusieurs années sur des théâtres d’opérations extérieurs : ils y ont connu des crimes d’une horreur sans nom. Le risque de prolongation de la barbarie lors du retour de ces citoyens européens est élevé. Pour eux, les digues de la raison sont tombées mais quelques espoirs de repentir subsistent tout de même. Depuis 2013, 18 filières terroristes ont été démantelées : il s’agit de filières d’acheminement, d’endoctrinement, de préparation de voyage et de recrutement. L’autoradicalisation via internet est aussi très importante et tend désormais à supplanter la radicalisation dans les mosquées. Ce n’est pas une radicalisation de surface, le phénomène est plus profond. 2 000 de nos ressortissants sont concernés (en cours d’endoctrinement), 600 Français sont en Syrie et en Irak dont 350 sont quelque part sur le chemin du retour. Le phénomène n’est donc pas numériquement anodin.

Lors du 13 novembre, un changement de mode opératoire a eu lieu. Les terroristes sont passés de l’attentat suicide classique et du crime ciblé (Charlie Hebdo) au commando afin de commettre un crime de masse. Dans le cas du 13 novembre, ce sont pour la plupart des non Français ou des Français qui ne résident plus en France. Beaucoup avaient de faux passeports ce qui démontrent l’interpénétration des filières terroristes et du crime organisé.

Que faire pour contrer la menace terroriste à l’échelon européen ?

Bernard Cazeneuve affirme avoir demandé il y a 20 mois une modification de la directive européenne sur la lutte contre le trafic d’armes. Or, on lui a répondu que les experts du marché intérieur de l’UE considèrent les armes comme des marchandises comme les autres. C’est un problème de lobbying : les groupes de pression de l’industrie de l’armement montent des campagnes pour influencer les ball-trap et les chasseurs afin de faire échouer toute tentative de modification touchant le marché des armes. En outre, Bernard Cazeneuve souhaite renforcer les contrôles aux frontières extérieurs de l’espace Schengen et pour cela faire monter en puissance l’agence FRONTEX. Il faut aussi mieux référencer et alimenter les bases de données existantes comme le SIS (Service d’information Schengen) et l’Eurodac (système informatisé de reconnaissance digitale de l’UE). Ces bases de données devraient être utilisées de manière plus intensive pour détecter les terroristes.

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Rémy SABATHIE

Secrétaire général et rédacteur géopolitique pour Les Yeux du Monde, Rémy Sabathié est analyste en stratégie internationale et en cybercriminalité. Il est diplômé de géopolitique, de géoéconomie et d’intelligence stratégique.

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