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L’Union Européenne lance son premier QG militaire

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Lundi 06 mars, les ministres européens des Affaires Étrangères ont jeté les bases d’un QG militaire intégré pour l’Union Européenne. Les 28 États membres se sont mis d’accord pour centraliser le commandement de certaines opérations extérieures dites à mandat non exécutif (non combattant), comme les opérations de maintien de la paix en cours en République centrafricaine.

Le lancement d’un QG militaire européen : premier pas vers une armée européenne ?

Un nouveau service d’environ 30 personnes sera donc chargé de la capacité militaire de planification et de conduite des opérations au sein de l’Etat-major de l’Union Européenne à Bruxelles. Ce département, sous la direction du Chef d’état-major européen, le général finlandais Esa Pulkkinen, chapeautera dans un premier temps environ 600 soldats au Mali, en Somalie et en République centrafricaine.

Interrogée devant la presse, la cheffe de la Diplomatie européenne, Federica Mogherini se dit fière de cette division, même s’il ne s’agit pas pour elle, « d’une armée européenne, mais seulement d’une façon plus efficace de faire notre travail militaire. »

La volonté de s’autonomiser dans un contexte d’incertitude politique

Face à une instabilité croissante aux marges est et sud européennes, et en réaction à l’illisibilité de la politique européenne de Trump, cette décision apparaît d’abord comme une volonté de trouver une alternative crédible et durable à l’OTAN.

Le GQ de l’Union Européenne ne sera cependant pas compétent pour les missions à mandat exécutif assurées par des troupes européennes. Les trois missions militaires exécutives de l’UE (Sophia contre les passeurs en Méditerranée, Atalante contre la piraterie dans la Corne de l’Afrique et Althéa en Bosnie-Herzégovine) continueront d’être commandées à partir de QG établis dans les Etats membres.

De quoi cependant envoyer un message fort sur la scène internationale : le Brexit n’a pas entaché la capacité de l’Union Européenne à aller de l’avant en matière de coopération. Mieux encore, certains observateurs font remarquer que cette décision pourrait être un prélude à une nouvelle façon d’envisager des opérations militaires européennes qui seraient désormais directement confiées au nouveau QG européen en lieu et place de l’OTAN. Notamment pour des opérations intra-européennes comme celle de surveillance aérienne des frontières ayant cours actuellement dans les pays Baltes.

Soutenir les industries européennes du secteur

En second lieu, il convient aussi d’évoquer la nécessité politique de consolider une industrie européenne de la Défense qui fait face, depuis plusieurs années déjà, à la réduction des budgets gouvernementaux. Ainsi, le budget de la DGAC consacré à la recherche aéronautique a été divisé par trois depuis 2012, passant de 150 millions d’euros à 50 millions en 2017.

D’où des prises de position régulières de la part de personnalités du monde de la Défense. En novembre 2016, le Chef d’Etat-major des Armées, le Général Pierre De Villiers rappelait ainsi que la France n’a que trop traîné à endosser l’objectif de l’Otan, défini en 2014 lors du sommet de Newport : 2% du PIB en matière de budget de la défense. Une prise de position naturellement soutenue par des cadres de l’industrie de Défense européenne, au premier chef Airbus.

Afin de soutenir l’industrie européenne de la Défense, une deuxième solution a bien souvent été mise en avant : la mise en commun des carnets de commandes des différentes armées européennes. Cependant, cette option apparaît plus difficile à mettre en œuvre qu’on ne le pense. Comme viennent nous le rappeler les récents déboires de l’A400M ou l’échec d’un accord européen quant à la construction de frégates aux normes communes. In fine, chaque pays exige des caractéristiques matérielles et un équipement bien différent, notamment car le matériel actuellement utilisé diffère fortement d’une armée à l’autre.

En résumé, malgré des avancées incontestables en la matière, le chemin vers une armée européenne aux capacités matérielles complémentaires et donc pleinement opérationnelle s’avère encore long.

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Fabien HERBERT

Fabien Herbert est Président des Yeux Du Monde et rédacteur géopolitique pour l'association depuis mars 2016. Formé à l’Université Catholique de Louvain, Fabien Herbert est journaliste et analyste spécialisé en relations internationales. Il s’intéresse notamment au monde russophone, au Moyen-Orient et à l'Asie du Nord-Est.

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