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La contrefaçon de médicaments, un enjeu global

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Quand on pense contrefaçon deux images nous viennent en tête ; faux sacs  à main et pays d’Asie du Sud-Est. C’est mésestimer l’adaptation permanente de cette forme de criminalité aux marchés porteurs. La contrefaçon de médicaments se définit, selon la directive européenne 2011/62/UE comme « un médicament comportant une fausse présentation de son identité, sa source, son historique ». Ce phénomène est en pleine expansion ; selon l’OMS environ 10% du marché mondial du médicament est occupé par des contrefaçons. En 2011, avec 24% des saisies enregistrées par les douanes européennes, le trafic de médicaments falsifiés détrôna celui des cigarettes. Ce phénomène méconnu cristallise, à l’échelle mondiale, de nombreuses problématiques de santé publique, de sureté de l’entreprise mais aussi de gouvernance.

Dans le domaine du médicament, la contrefaçon n’a pas de limites ; elle touche les produits de confort (Viagra®, sevrage tabagique, minceur), les traitements pour pathologies lourdes (vaccins, traitements cancéreux), les dispositifs médicaux, mais aussi les produits vétérinaires. Les risques sont multiples ; outre le fait d’être privé de traitements efficaces, le patient peut ingérer des substances toxiques ; près de 700 000 victimes sont dénombrées dans le monde chaque année. Des enjeux de long terme se profilent avec le risque de développement d’une résistance à certaines souches (antipaludéens,…) et ce dans un contexte d’accroissement des résistances aux traitements antibiotiques et de recrudescence des épidémies (H1N1, H7N9). L’explosion du nombre de pharmacies en ligne, dont près de 95% se révèlent illicites, facilite l’accès aux faux médicaments et donc aux risques.

Problématique plus connue mais qu’il est nécessaire de rappeler ; la contrefaçon nuit à l’entreprise. Dans le cas d’une contrefaçon de maroquinerie la santé du client n’est pas engagée, elle l’est avec un faux médicament. Des problématiques d’images en découlent ; l’industrie pharmaceutique, déjà touchée par des scandales (Médiator®, prothèses PIP) ne peut se permettre de voir se développer des atteintes à son image, liées aux effets indésirables des contrefaçons, sur les marchés émergents. En effet, la contrefaçon peut déjà y atteindre près de 30% du marché de médicaments. Une telle implantation des réseaux, liée à une hausse des dépenses de santé dans les pays émergents, laisse présager un accroissement du phénomène.

Enfin, la contrefaçon de médicaments soulève des enjeux de gouvernance et de coopération à l’échelle mondiale. Le manque d’harmonisation des droits de propriété intellectuelle encourage certains pays (du Mexique au Pakistan) à développer des réseaux de fabrication de médicaments génériques en violation des brevets déposés par les industries pharmaceutiques et dans l’indifférence à l’égard de l’assurance qualité. Ces produits inondent ensuite le marché mondial. On retrouve même des acteurs inattendus sur ce marché comme le Hezbollah, qui le préfère, comme source de financement annexe, au trafic de stupéfiants bannit par la Charia. Interpol a cerné les liens qui lient organisations criminelles transnationales et contrefaçon de médicaments et mènent de nombreuses actions (opérations Pangea).

Ainsi, la contrefaçon de médicaments est un enjeu majeur aux multiples facettes. L’accroissement de la population mondiale exacerbant les problématiques sanitaires, il faut s’attendre à voir s’accroitre, sur le modèle du trafic de stupéfiants, les actions de lutte et de prévention.

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