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Le repositionnement géopolitique de l’Asie Centrale au tournant du XXIème siècle

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Islam Karimov, inamovible président ouzbèke, dictateur violent... et grand ami de Gérard Depardieu!
Islam Karimov, inamovible président ouzbèke, dictateur volontiers violent… et grand ami de Gérard Depardieu!

Kazakhstan, Ouzbékistan, Kirghizstan, Tadjikistan, Turkménistan… Ces anciennes républiques soviétiques d’Asie Centrale, aussi pauvres qu’oubliées de l’actualité, ont été placées par la force des choses au centre d’enjeux géopolitiques globaux. Plus que leurs ressources naturelles, qui bien que réelles (gaz et pétrole notamment) sont pénalisées par l’isolement géographique de la région, c’est la montée en force des puissances régionales qui a mis en lumière cette « zone d’ombre » du globe. L’Asie centrale, par sa position géographique, se trouve au confluent d’un nombre impressionnant de sphères d’influences : Iran, Inde/Pakistan, Turquie, mais surtout Chine, Russie et Etats-Unis.

L’Asie centrale a été détachée de l’URSS presque « contre son gré », la chute de l’empire soviétique ayant précipité ces républiques dans une détresse économique dont elles ne parviennent pas à sortir (à l’exception notable du Kazakhstan). D’un point de vue géopolitique, c’est la peur de l’islamisme qui va très vite guider le positionnement de la plupart des dictateurs centre-asiatiques, souvent héritiers (plus ou moins assumés) de l’ère soviétique. En effet, la fragilité économique et sociale, la brutalité des systèmes répressifs en place (notamment dans l’Ouzbékistan d’Islam Karimov) et le népotisme des « clans présidentielles » forment un terreau fertile au développement d’un islamisme radical. Ainsi, au tournant des années 2000, violences et attentats-suicides secouent la région, et notamment l’Ouzbékistan et le Kirghizstan, frappés par le MOI (Mouvement Islamique d’Ouzbékistan).

L’assassinat du commandant Massoud en Afghanistan et les attentats du 11 septembre 2001 vont ainsi créer un mouvement de « ralliement » des régimes locaux au camp américain. Ainsi, Ouzbékistan et Kirghizstan autorisent l’établissement de bases aériennes américaines sur leur sol, alors que les autres républiques permettent le survol de leur territoire par les appareils de la coalition.

La lune de miel pro-américaine est cependant de courte durée. Si le péril islamiste est réel, l’alliance américaine accroit un autre risque : la contestation politique. De plus, la Russie de Poutine, en plein « regain », accroit sa pression sur la région, notamment suite à la Révolution Orange ukrainienne (2004) et à la Révolution des roses en Géorgie (2003), mal digérées par Moscou. Dès 2003, Kazakhstan et Tadjikistan, proches du Kremlin, mettent fin à leur autorisation de survol.

Le « tournant » a lieu en 2005, avec la Révolution des Tulipes au Kirghizstan, qui voit le président Akaev pacifiquement destitué. Le rôle des ONG internationales dans ce mouvement, en grande partie financées par les Etats-Unis, est un signal d’alarme pour les dictatures centre-asiatiques, qui procèdent à un définitif retournement d’alliance.

L’Asie centrale choisit donc d’entrer dans le giron « sino-russe ». Moscou et Pékin offrent le triple avantage de la puissance militaire, de la lutte déterminée contre l’islamisme et de la non-ingérence politique. L’aboutissement symbolique de ce nouvel axe géopolitique est l’OCS (Organisation de Coopération de Shanghai), alliance militaire qui regroupe Russie, Chine, Asie centrale (hors Turkménistan, pays facialement neutre), Biélorussie et Arménie. Les grandes manœuvres de 2007 et le refus affiché de « l’unipolarité » américaine par l’OCS n’ont ainsi pas manqué d’inquiéter les observateurs américains.

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