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Qu’est-ce que la déflation ?

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La déflation est la contraction des grandeurs économiques nominales (diminution des prix, des salaires, de la masse monétaire), qui peut entrainer une contraction des grandeurs réelles (diminution de la demande, de la production, de l’emploi). 

Qu'est-ce que la déflation ?
Qu’est-ce que la déflation ?

Au XIXe siècle, la déflation était la manifestation de la crise mais aussi le processus de sortie. Dans le cycle Juglar*, elle correspond à la purge, qui restaure l’équilibre après que le goût du jeu se soit emparé des imaginations. C’était un processus spontané, un temps dans le cycle, lié à la régulation du marché. Dans les années 20, la purge n’ayant pu lieu, la déflation devient une politique. L’objectif était double : monétaire d’abord, afin d’assurer la parité-or dans le système de Gênes (jusqu’en 31 en Grande Bretagne, 1936 en France), et indirectement réel, la crise étant interprétée comme surproduction, la déflation élimine la partie de l’offre excédentaire (purge).  Ainsi, en Grande Bretagne, MacDonald (1929 – 1931) diminue la rémunération des fonctionnaires (-10%) et les allocations chômages, en Allemagne, Brüning, par quatre décrets (1930 – 1931), veut « revenir aux prix de 1913 », et en France, Doumergue puis Laval (1935) diminuent les dépenses de l’Etat (-10%) et les prix administrés.

Cependant, ces politiques malthusiennes de déflation échouent après la crise de 1929, la déflation cumulative renforçant la crise. Avec Fisher** (1933), on la craint. Dès lors, la plupart des Etats mènent à partir des années 1932-1933 des politiques de relance qui visent à augmenter la demande globale, afin de relancer l’activité et limiter les effets sociaux. Ces politiques sont empiriques et pragmatiques, théorisées plus tard par Keynes. Hoover, le premier, ne s’enlise pas dans la déflation européenne, et promet que la prospérité est au coin de la rue. Roosevelt ira plus loin avec son fameux New Deal. En France, Léon Blum (1936) est élu pour en finir avec la déflation (les salaires augmentent de 15% suite aux accords de Grenelles), mais sera rattrapé par la contrainte monétaire. Pourtant, ce n’est vraiment qu’à la fin des années 30 que l’on accepte le déficit conjoncturel et le soutien direct à l’activité, marquant la véritable rupture dans l’interventionnisme de l’Etat, qui se pose en garant de l’intérêt général.

De l’après guerre aux années 80, l’heure est davantage à l’inflation, contre laquelle on lutte, par le blocage des prix d’abord – lors des plans Pinay (1952) ou Giscard (1963) par exemple –, puis par des politiques monétaristes (orientées par Volcker à la FED en 1979) ou de désinflation compétitive en Europe. La croissance, le keynésianisme dominant et la disparition des cycles semblèrent sonner le glas de la déflation.

Mais le retour des crises réactualise la problématique de la déflation. Elle n’est plus aujourd’hui un moyen de sortie de crise et doit être évitée, car dès lors qu’elle frappe, les politiques conjoncturelles sont vaines : on peine à sortir de la déflation car les agents s’y adaptent (les menages refusent de consommer, i.e. d’acheter aujourd’hui ce qui sera moins chère demain, et les entreprises d’investir). En le comprenant, la Suède en 1992 (création de bad banks), puis les Etats-Unis en 2008 (quantitave easing) s’en sortent mieux que le Japon et sa décennie perdue, enlisé dans la déflation.

Fisher avait prévenu, la peur de la déflation doit être plus importante que la peur de la dette, car l’obsession du désendettement attise la déflation, et la déflation augmente mécaniquement le coût réel de la dette. La déflation n’est donc pas le strict inverse de l’inflation, au sens où elle est bien plus difficile à combattre.

*Des crises périodiques et de leur retour périodique en France, en Grande Bretagne et aux Etats-Unis, 1962.

**Concept de « déflation par la dette ».

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