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Tokyo 2020 : des Jeux “écologiques et novateurs” ?

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56 ans après l’édition de 1964, Tokyo se prépare à accueillir les Jeux Olympiques d’été 2020. La XXXIIᵉ olympiade se déroulera du 24 juillet au 09 août 2020. Les Jeux paralympiques seront ensuite célébrés du 25 août au 06 septembre 2020. Alors que les organisateurs promettent des Jeux Olympiques écologiques et high-tech, le Japon a encore de nombreux défis à relever à un an de l’événement.

Les mascottes des Jeux de Tokyo seront bleu foncé pour les Jeux Olympiques et fleur de cerisier pour les Jeux Paralympiques
Les mascottes – bleu foncé pour les JO, fleur de cerisier pour les Jeux Paralympiques – allient valeurs traditionnelles et design futuriste. Ils incarnent parfaitement le concept “L’innovation à partir de l’harmonie”, au cœur de la vision de marque de Tokyo 2020.

A un an des Jeux, le comité organisateur estime que toutes les infrastructures seront prêtes à temps. Tokyo s’appuyait en effet sur 60% de sites déjà existants. La moitié des dix sites temporaires et huit nouveaux sites permanents sont déjà bouclés. Le Musashino Forest Sport Plaza, qui accueillera les matchs de badminton, est déjà utilisé depuis fin 2017. Le centre de tir à l’arc, le bassin d’aviron et le Kasai Canoe Slalom Centre ont également été inaugurés. Selon les organisateur, le stade olympique sera terminé en novembre, le village olympique en décembre.

Tokyo 2020 : les Jeux les plus novateurs de l’histoire

Les Jeux Olympiques de 1964 avaient été qualifiés par le gouverneur d’époque, Ryotaro Azuma, “d’opportunité pour construire un nouveau Tokyo et un nouveau Japon”. 20 ans après la Seconde Guerre mondiale, les Jeux représentaient alors un vecteur de progrès social et d’ouverture au monde. Ils avaient été perçus comme un événement décisif pour la transformation des infrastructures et l’intégration du Japon dans le concert des Nations. Malgré un contexte très différent, les attentes sont tout aussi grandes pour l’édition de 2020. Le gouvernement japonais souhaite que les Jeux “changent l’avenir du Japon”, en revitalisant le pays.

Tokyo compte ainsi s’appuyer sur ses héros de pop culture et sur son savoir-faire technologique pour promouvoir son image. « Nous voulons que les Jeux de Tokyo soient les plus innovants de l’histoire et les robots joueront un rôle fondamental à cet égard« , a déclaré Masaaki Komiya, Directeur général adjoint de Tokyo 2020. Les organisateurs ont, en ce sens, annoncé la mise en place d’un “robot project” : les spectateurs en fauteuil roulant pourront par exemple bénéficier d’une assistance robotique et d’écrans mobiles adaptés. Les robots pourront aussi servir d’interprètes aux spectateurs. La diffusion en direct d’émissions en 8k sur des réseaux 5G est également prévue. Enfin, la reconnaissance faciale devrait être mise en place pour sécuriser les sites et pour les accréditations.

Des Jeux propres pour attirer les touristes

Le pays espère, grâce aux Jeux, attirer 40 millions de touristes en 2020, soit 10 millions de plus que le record de 2018. Neuf millions de billets seront mis à disposition des spectateurs pour assister aux compétitions. 20 à 30% de ce total sont réservés aux spectateurs et sponsors internationaux. 3,22 millions de billets ont d’ores et déjà été vendus pendant la première phase de vente sur le marché intérieur. Les “Jeux olympiques de la reconstruction” ont aussi pour but de vanter les progrès de l’Empire du soleil levant en matière d’écologie.

Le Japon, grâce à un ambitieux plan de développement durable, souhaite promouvoir des Jeux écologiques et zéro déchet. A ce titre, les médailles seront fabriquées en métal recyclé, les tenues des athlètes japonais à partir de vêtements usagés et les podiums en déchets plastiques. Les nouveaux sites permanents seront utilisés pour des événements sportifs et publics. Quant aux villages olympique et paralympiques, ils seront transformés en zones résidentielles et en appartements.

La renaissance de Fukushima

Neuf ans après la catastrophe nucléaire engendrée par le tsunami, Fukushima espère renaître grâce aux Jeux. Le complet sportif J-Village, longtemps utilisé comme un centre opérationnel de lutte contre les conséquences de 2011, est redevenu en avril 2019 un centre d’entraînement. Le 26 mars prochain, le périple de la flamme olympique débutera au sein de ce centre construit en 1997.

Utilisée comme camp d’entraînement par les équipes masculines et féminines japonaises de football, Fukushima accueillera durant les Jeux des matchs de baseball et de softball. Comme l’a souligné le directeur de projet des communications internationales de Tokyo 2020, “inscrire les JO à Fukushima, c’est un signal fort”. Après le tsunami, 160 000 personnes avaient été évacuées. Certaines zones sont toujours interdites et plus de 40 000 habitants ne sont pas revenus. Avec les Jeux, le gouvernement espère convaincre les habitants de regagner les zones décontaminées et ainsi revitaliser l’espace.

Combattre la chaleur

Le climat pourrait être le plus grand défi à relever pour Tokyo. Les étés japonais sont en effet de plus en plus chauds, selon l’Agence météorologique du Japon (JMA). La chaleur, aggravée par le manque relatif d’ombre dans la capitale japonais, menace la santé des athlètes et des spectateurs. Les organisateurs assurent cependant chercher des solutions pour limiter au maximum l’impact de la chaleur. Ils se sont appuyés sur les expériences d’Athènes et de Pékin, deux éditions marquées par des chaleurs extrêmes.

L’installation de jets d’eau, de packs de glace et de zones ombragées est en phase de test. Un système de capteurs mesurera des éléments comme la température ou le rayonnement solaire. Décision a également été prise de faire commencer le marathon olympique à 6 heures du matin, soit une heure plus tôt que prévu. Le parcours du marathon sera aussi recouvert d’un matériau spécifique à base de résine. Ce dernier réfléchit les rayons infrarouges et peut faire baisser la température de la chaussée de 8°C.

Défis logistiques, inégalités sociales et accusations de corruption

Au-delà de la chaleur, Tokyo 2020 fait face à de nombreux défis, parmi lesquels la qualité de l’eau, le faible niveau de langues étrangères au Japon ou le manque d’hébergement touristique dans une mégapole surpeuplée. La question des transports est également avancée, alors que les trains sont déjà bondés aux heures de pointe. Le gouvernement devrait mettre en place des systèmes de logistique pour gérer le trafic routier et ferroviaire. Il souhaite également inciter les salariés à rester chez eux. Cela sera difficile dans un pays où la pratique du télétravail est peu ancrée dans les mentalités.

Alors qu’un troisième ouvrier est décédé sur les chantiers olympiques début août, les critiques se portent également sur le coût important des Jeux – 12,5 milliards de dollars. Il est reproché au gouvernement d’avoir laissé de côté des sujets importants, comme la pénurie de main d’œuvre et la crise du vieillissement, l’inégalité des sexes ou le manque de diversité. En outre, l’attribution des Jeux à Tokyo est entachée de soupçons de corruption. L’ex-président du Comité olympique Tsunekazu Takeda a renoncé à son poste après sa mise en examen en France pour corruption active dans le cadre de l’attribution des Jeux.

Des Jeux sans l’Italie ?

Le Japon devra ainsi relever plusieurs défis importants pour la bonne tenue des compétitions. Les Jeux Olympiques ne transformeront certes pas le pays en profondeur. Tokyo 2020 a cependant pour objectif de montrer la voie des “nouveaux” Jeux Olympiques. Des Jeux Olympiques plus propres, où la ville qui les accueille ne se transforme pas, mais les intègre dans un environnement urbain durable.

Des Jeux qui pourraient se dérouler sans l’Italie. En effet, le pays de Matteo Salvini risque l’exclusion du mouvement olympique à cause d’un projet de loi porté par le gouvernement italien qui met en danger l’autonomie du sport vis-à-vis de la politique. L’adoption de ce texte rendrait le Comité olympique italien non-conforme aux principes de la Charte olympique. L’Italie serait le premier grand pays à être exclu pour “ingérence gouvernementale” depuis l’Inde en 2012.

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Solène VIZIER

Solène Vizier est diplômée d’un Master 2 Etudes Stratégiques. Passionnée de géopolitique, ses domaines de spécialisation concernent les mondes hispanophone et russophone, le désarmement nucléaire et la géopolitique du sport. Elle est rédactrice aux Yeux du Monde depuis avril 2019.

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