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Que reste-t-il de la révolution d’Octobre un siècle après ?

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En 1917, la Russie a connu la Révolution d’octobre qui a permis à Lénine puis à Staline d’accéder au pouvoir. Un siècle plus tard, l’événement est toujours célébré au sein de la Mère Patrie. A cette époque, cette révolution se solde par des troubles politiques. En effet, de 1918 à 1921 la Russie connaît une guerre civile. Cette dernière opposait l’armée blanche, formée par ceux qui profitaient de l’ancien régime (Koulaks, les Mencheviks), à l’armée rouge, les Bolcheviks. Suite à la victoire des Bolcheviks, une dictature du prolétariat fut mise en place. Les conditions de vie du peuple russe sont également bouleversées : l’économie est planifiée, la famine gagne la population, les terres sont collectivisées. Un siècle après, une question se pose : que reste-t-il de la révolution en Russie ?

Le travail de mémoire…

Mausolée de Lénine, Père de la Révolution, sur la Place rouge.

L’État a été la première entité touchée par la révolution d’Octobre mais également la première à être complètement réinventée par les Bolcheviks. La reconstruction de l’Etat passe par la mise en place d’une série de piliers fondamentaux. Tout d’abord, l’armée est modernisée avec la mise en place d’une armée plus efficace que les autres. A cette armée moderne s’ajoutent des appareils de répression contrôlés par de très forts pouvoirs. Enfin le pouvoir en place parvient à élaborer un nouvel appareil d’État. Cet appareil se constitue à la fois avec des ralliés monarchistes et un ensemble de nouveaux venus qui étaient dans les comités sans être nécessairement bolcheviks et qui vont y trouver une place.

La Russie contemporaine a fait canoniser en 2000 par l’Église orthodoxe le tsar Nicolas II, assassiné avec sa famille par les Bolcheviks, tandis que Lénine, ennemi de l’Église repose toujours sur la Place Rouge. Le travail de mémoire réalisé par les différentes générations n’est pas identique. Si pour les anciens ayant grandi avec l’influence du communisme, il est important d’aller se recueillir régulièrement sur le corps de Lénine, Père de la Révolution. Pour la génération actuelle, le constat est différent. En effet, beaucoup pensent que le corps de Lénine devrait être enterré. A ce propos, nous pouvons citer les propos d’une jeune Russe après sa première visite du mausolée de Lénine lors du centenaire des événements d’octobre : « C’est une visite intéressante car c’est la première fois de ma vie mais il n’y a pas émotion car c’est une momie, c’est comme une figure de cire. Beaucoup pensent qu’il faut enterrer le corps de Lénine, que c’est une horreur qu’un cadavre se trouve encore dans le centre de Moscou mais tant qu’il y aura des communistes Lénine ne sera pas enterré« .

…qui se heurte aux défis contemporains

Alors que l’anniversaire de la Révolution était célébré en grande pompe à l’ère soviétique, avec un immense défilé militaire sur la Place Rouge, le programme du centenaire innove peu et se contente d’expositions et de colloques de spécialiste. Les rares manifestations à destination du grand public auront pour objectif de mettre en avant l’unité nationale et la réconciliation. Pour cela, les autorités russes ont décidé d’éviter les sujets dits « sensibles » afin de ne pas susciter de débordements incontrôlés. Cette prudence se reflète également dans le comité spécialement créé pour les commémorations. Vladimir Poutine a décidé d’y faire siéger des personnalités indépendantes et critiques du pouvoir, des ministres et des responsables de l’Église orthodoxe. Toutefois, il n’y a aucun membre du Parti communiste actuel ou représentant de la tendance monarchiste.

Néanmoins, toutes les générations s’accordent sur le fait que la révolution d’Octobre 1917 n’a pas réellement modifié la Russie. Le pays est resté le même sans les bourgeois. Mais l’émergence d’une nouvelle bourgeoisie a amené Vladimir Poutine à repenser sa politique. Pour l’essentiel, les entrepreneurs ne s’immiscent plus directement dans les affaires de l’État, mais laissent ce soin aux fonctionnaires et aux politiciens professionnels. De son côté, le gouvernement de Poutine, conscient de l’importance des oligarques (nouveaux bourgeois) pour le PIB du pays, s’efforce de créer les conditions favorables aux affaires en garantissant, au-delà des intérêts des propriétaires individuels, les principes de l’entreprise privée et du marché libre. Malgré les arrestations d’oligarques dont l’ancien PDG de la compagnie pétrolière Ioukos, Mikhaïl Khodorkovski, Poutine n’a pas pris pour cible la grande bourgeoisie, bien au contraire. Au sein de son gouvernement, l’ancien membre du KGB a d’ailleurs choisi l’un des principaux représentants du courant libéral en parfaite rupture avec les idées du communismes inculquées à la suite de la révolution d’Octobre, Guerman Gref. Ce dernier a été son ministre du développement économique de 2000 à 2007 avant d’endosser la fonction d’actuel président de la Sberbank.

Outre le gouvernement et le travail de commémoration, la vie quotidienne et notamment associative reste marquée par les événements d’octobre. Les autorités politiques craignent un nouveau scénario révolutionnaire. Pour cette raison, ils contrôlent les manifestations du parti politique au pouvoir mais également de l’opposition. Cela se solde par des arrestations massives. Selon une enquête réalisée par le centre Levada, si une manifestation avec une connotation politique devait avoir lieu dans une ville russe, 80% de ses habitants n’y participeraient pas.

 

 

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