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Budget de la défense : la France face à un choix

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François Hollande discute cette semaine avec les ministres concernés des nouvelles « priorités stratégiques » de la France. Lire « comment diminuer drastiquement les dépenses militaires sans sacrifier l’armée française ». Cette question, qui provoque des débats passionnés au sein de la classe politique, de l’armée et des acteurs de la défense, reste, à tort, trop peu commentée dans la sphère publique.

Bercy voudrait ramener le budget de la défense à 1,18% du PIB d’ici à 2025, contre 1,56% du PIB pour 2013. Derrière ces chiffres somme toute abstraits se cache une réalité extrêmement dure.

En effet, à titre de comparaison, la France dépensait en 2002 2,5% de son PIB pour l’armée, ce qui signifie que l’on parle d’une baisse de 112% des dépenses (en relatif) sur une vingtaine d’années ! De plus, quand on sait que l’OTAN fixe à 2% le seuil minimal pour qu’un pays soit à même d’assurer convenablement sa sécurité, les 1,18% paraissent moins abstraits…

Cette tendance à la baisse (drastique) est généralisée en Europe : Allemagne et Grande-Bretagne sont eux aussi en train de discuter les modalités des coupes budgétaires, et ne parlons pas de l’Italie, de l’Espagne ou de la Grèce.

A l’inverse, elle survient dans un contexte mondiale de forte hausse des dépenses militaires : en effet, les émergents, au premier rang desquels les fameux BRICS, tirent la croissance mondiale dans ce domaine, car la hausse de leurs dépenses militaires est encore plus élevée que la croissance de leur PIB.

La France est donc sur ce sujet face à une question politique, stratégique, économique et géopolitique d’une grande complexité.

En diminuant de la sorte son budget de la défense, la France se confronte à trois risques majeurs.

Un risque de déclassement, car à terme le pays ne sera plus en mesure de garder son statut actuel de « grande moyenne puissance », notamment du fait de la montée des émergents. A l’heure où la France se réjouit de pouvoir encore jouer au gendarme du monde au Mali (après la Libye), la question est politique : les français sont-ils profondément attachés à ce statut ? Veulent-ils que leur pays soit à même de participer activement à la préservation de la sécurité mondiale ?

Un risque de sécurité, car avec une telle réduction de ses dépenses, la France devra encore plus se placer sous le « parapluie protecteur » des Etats-Unis, à l’heure où Washington a tendance à profondément se désengager d’Europe, et où l’actualité nous montre que les risques stratégiques ne sont pas en diminution dans le monde.

Enfin il existe un risque économique et social, car le secteur emploie directement ou non plus de 165 000 personnes en France. Au-delà de ce chiffre, la question doit être posée en ces termes : cet effort ne serait-il pas plus « productif » pour l’emploi et la croissance s’il était redirigé vers d’autres secteurs (les énergies nouvelles, la recherche…) ?

Sur ces trois points, il n’y a pas de bonne ni de mauvaise réponse. Il s’agit de faire un choix, et tout choix implique un renoncement. Le débat est ouvert. Reste aux français de s’en emparer.

Lors de son intervention télévisée du 28/03, François Hollande a annoncé qu’il ne toucherait pas au budget de la défense… Pour l’instant. Le débat est donc, de fait, reporté sine die.

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