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L’empereur Akihito laisse place à une nouvelle ère pour le Japon

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L’ère Heisei prend fin ce 30 avril au Japon. Après 30 ans de règne, l’empereur Akihito a pris la décision d’abdiquer. À 85 ans, sa fonction et l’agenda qu’elle impliquait devenaient trop lourds à porter. Son fils, le prince héritier Naruhito, lui succèdera le 1er mai à l’âge de 58 ans. Il ouvrira ainsi l’ère Reiwa. Ce nom évoque l’idée d’harmonie ordonnée, d’espoir. Il est tiré d’un poème issu du Man’yôshû – première anthologie de waka, un genre de la poésie japonaise. Shinzô Abe a souligné que pour la première fois, le nom de l’ère était issu d’un texte japonais, et non chinois.

L'empereur Akihito et l'impératrice Michiko. Derrière, le prince héritier Naruhito.
L’empereur Akihito et l’impératrice Michiko. Derrière, le prince héritier Naruhito.

Empereur, un rôle symbolique contourné par Akihito

Comme inscrit dans la Constitution du Japon votée en 1946, et entrée en vigueur en 1947, l’empereur est le symbole de l’État et de l’unité du peuple. Il est également le chef de la religion shinto, la plus ancienne pratique religieuse de l’histoire de l’archipel. Néanmoins, il est dénué de tout pouvoir politique et doit faire preuve de réserve.

L’empereur Akihito a tout de même fait preuve d’un certain engagement. En 1990, lors d’une visite officielle du président sud-coréen Roh Tae-woo, il exprime lors de leur entrevue « le plus profond remords » face aux exactions japonaises passées. Il renouvellera ces regrets par la suite. L’empereur Akihito a également évoqué « [la] période tragique pendant laquelle [le Japon] causa de grandes souffrances au peuple de Chine » en octobre 1992. Plus généralement et plus récemment, le 15 août 2015 lors d’une cérémonie d’anniversaire de la capitulation du pays en 1945, il déclare à nouveau de « profonds remords » pour toute la période de la Seconde Guerre mondiale. Il s’agit d’une première pour un empereur.

En parallèle, Akihito fut représentatif d’une certaine modernité et d’une ouverture. Marié à une roturière, l’impératrice Michiko, il part à la rencontre du peuple. Il est le premier empereur à autant aller au contact de la population comme en mars 2011, suite à la catastrophe de Fukushima. Le couple impérial effectue des visites aux victimes.

L’abdication, un chamboulement dans l’organisation officielle

L’abdication n’étant pas légalement prévue, le Parlement a dû voter une loi d’exception en 2017 afin que l’empereur Akihito puisse quitter le trône. Un chamboulement puisque les documents administratifs, officiels, les calendriers ou encore les agendas citent la date en fonction de l’ère. 2019 est par exemple l’an 31 de l’ère Heisei. Akihito deviendra empereur émérite suite à son abdication. Cette dernière devait avoir lieu à une date fixée par décret dans un délai qui ne dépasse pas 3 ans après sa promulgation.

Le prince Naruhito, à 58 ans, devient donc le nouvel empereur du Japon aux côtés de son épouse Masako. Nul doute qu’après la relative mais nouvelle modernité adoptée par son père, sa posture sera scrutée. Le prince héritier a néanmoins exprimé le désir de poursuivre sur la voie tracée par son père, notamment en ce qui concerne le passé militariste japonais. Le système impérial demeure néanmoins très conservateur, les femmes ne pouvant par exemple pas prétendre à la succession. Ce sujet fait débat au Japon aujourd’hui.

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Jessy PÉRIÉ

Diplômée d'un Master 2 en Géopolitique et prospective à l'IRIS, Jessy Périé est analyste géopolitique et journaliste, spécialisée sur la zone Asie orientale. Elle s'intéresse particulièrement aux questions de politique extérieure chinoise et japonaise.

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