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2020 : Fin de l’Accord de Cotonou et nouvelle forme de coopération ?

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Les relations entre les pays africains et l’Europe sont anciennes. Elles reposent sur un passé colonial important, des liens économiques et politiques forts, des échanges culturels et commerciaux nombreux. Aujourd’hui, l’Afrique est confrontée au double défi de la croissance démographique et du changement climatique. L’Europe, partenaire historique, se doit de répondre présente pour l’accompagner dans la voie de la croissance économique. Elle devra intégrer le fait que des pays émergents y déploient une nouvelle forme de coopération qui n’est plus basée sur une aide au développement. La renégociation de l’Accord de Cotonou pourrait ouvrir la porte vers une nouvelle forme de coopération.

Avec l'Accord de Cotonou, l'Europe et l'Afrique doivent redéfinir leur coopération.
Une coopération ancienne à redéfinir

Une coopération d’abord basée sur des accords de préférences commerciales

La coopération entre les deux continents s’est tout d’abord matérialisée par des politiques commerciales et d’aide au développement. En 1963, la Communauté économique européenne et les 18 États africains et malgaches associés signent la première Convention de Yaoundé. Valable pour cinq ans, celle-ci confirme l’association Europe-Afrique grâce à une liberté d’échanges commerciaux. Elle met également en place une aide financière de la CEE envers les pays de l’EAMA. En 1975, la CEE signe, avec 46 pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (pays ACP) la Convention de Lomé. Les signataires renouvelleront ensuite cet accord de coopération commerciale en 1979 (57 pays), 1984 (66), 1990 (70) et 1995 (70).

En 2000, l’Accord de Cotonou remplace la Convention de Lomé. L’Union Européenne et 79 pays ACP sont signataires de cet accord pour une durée de 20 ans. L’une des nouveautés majeures de cet accord concernait le volet commercial, dissocié pour la première fois de l’aide au développement. Il instaurait des zones de libre-échange entre l’UE et les pays ACP, appelés Accords de Partenariats Économiques (APE).

Dès les premières négociations, les contestations ont été nombreuses de la part des pays ACP. Ceux-ci mettaient le doigt sur les conséquences sur leurs économies fragiles, et notamment sur le budget, la balance des paiements, les maigres flux commerciaux régionaux, et la production agricole et industrielle. Pour la première fois les Etats africains ont, dans leur grande majorité, remis en cause le partenariat proposé par l’Europe. Ils semblent de plus en plus tentés d’établir des relations commerciales avec des pays émergents, tels que la Chine, l’Inde ou le Brésil.

Accord de Cotonou : une coopération à redéfinir

Le cinquième sommet Union Européenne – Afrique s’est tenu en novembre 2017 à Abidjan. L’enjeu principal de celui-ci était une refonte des relations entre les deux continents à l’approche de l’expiration de l’Accord de Cotonou en 2020. Les États ont fixé quatre priorités communes et stratégiques pour les années à venir : éducation et formation ; paix, sécurité et gouvernance ; investissements et croissance économique ; et enfin migration et mobilité.

Ce sommet a permis de mettre en exergue le fait que de nombreux points de l’Accord de Cotonou n’étaient plus adaptés au contexte actuel. Un partenariat spécifique doit être établi avec le continent africain et un autre avec les régions des Caraïbes et du Pacifique car les deux zones sont très hétérogènes. Le nouveau contexte d’industrialisation à partir des matières premières du continent impose que le secteur privé soit sollicité et s’engage. Les aides bilatérales ou multilatérales ont une efficacité de plus en plus contestée.

Une coopération pour un rapport gagnant – gagnant

Dans son rapport spécial n°20/2018, la Cour des comptes européenne a estimé que l’appui de l’Union Europénne à l’Afrique a peu d’effet. Les accords commerciaux souvent à l’avantage des pays européens contraignent ceux-ci à dédommager les pays africains par des aides qui génèrent corruptions et mécontentements. Il faut davantage de cohérence dans les politiques européennes, et donner la priorité aux investissements et au développement industriel. La renégociation des Accords de Cotonou a formellement commencé le 28 septembre 2018. D’autres domaines prioritaires sont apparus tels que la démocratie et les droits de l’homme, le changement climatique, ou l’éradication de la pauvreté.

Ces nouvelles discussions pourraient être une occasion unique de façonner un partenariat plus ambitieux et mieux adapté aux réalités actuelles. L’Union européenne mature, vieillissante et menacée de stagnation se confronte à une Afrique jeune, dynamique et en pleine extension. L’Europe recherche des relais de croissance au sud et veut ainsi limiter les migrations définitives au profit de la mobilité professionnelle. L’Afrique veut quitter l’économie de rente, s’industrialiser à partir de ses matières premières et modifier ses modes de gouvernance. Les priorités ne sont pas les mêmes mais les intérêts peuvent se rejoindre.

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Marie-Christine BIDAULT

Marie-Christine Bidault est étudiante en journalisme à l'ESJ Paris. Par ailleurs Analyste en stratégies internationales (IRIS Sup') et Ingénieur en agriculture (ISARA Lyon), elle s'intéresse fortement aux questions de géopolitiques environnementale, agricole et alimentaire, avec un intérêt particulier pour les politiques américaines.

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