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Le plan de relance européen face à un nouveau blocage

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Le 16 novembre 2020, se réunissaient à Bruxelles les ambassadeurs européens auprès de l’Union européenne. L’objectif était de voter le plan de relance et le budget des sept prochaines années. C’était sans compter sur la Pologne et la Hongrie qui ont ruiné toute perspective d’un lancement du plan en avril. Retour sur cet épisode européen aux multiples péripéties.

Plan de relance européen
Le 16 novembre, la réunion des ambassadeurs européens essuie un nouvel échec.

Un long processus

En mai 2020, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, évoque pour la première fois un plan de relance. Cette annonce ne valait rien sans l’aval par la suite des 27 états membres de l’Union. Le 21 juillet dernier, les 27 lui donnent cet aval. Après quatre jours et autant de nuits de négociations, les chefs d’état et de gouvernement européens annonçaient un plan de relance exceptionnel. On prévoit 750 milliards d’euros afin d’accompagner les pays de l’Union pour faire face à la crise économique amorcée par la crise sanitaire. Jamais une dette aussi importante n’aura été émise de manière mutualisée par l’Europe.

Cette annonce n’était que le début d’une longue procédure. Les prochaines étapes sont nombreuses avec notamment la nécessité de la validation du projet par le Parlement et de nombreux votes dont certains textes qui requièrent l’unanimité des 27 états membres.

Blocage après blocage

Première à bloquer, l’Allemagne refusait de générer une dette commune. La Banque centrale européenne fixe généralement les taux d’emprunt en fonction de la fiabilité des états. Lorsqu’aujourd’hui, l’Italie emprunte à un taux de 2,4%, l’Allemagne emprunte à un taux négatif de 0,4%. Après de nombreuses négociations, Berlin a cessé de bloquer le plan de relance, en l’acceptant à condition qu’il soit donné la priorité aux subventions plutôt qu’aux prêts.

Le deuxième blocage a eu lieu du côté des états dits « frugaux » c’est-à-dire l’Autriche, la Finlande, les Pays-Bas et la Suède. Ces états, très regardants sur les questions budgétaires, ne voulaient pas payer pour les états « cigales » comme par exemple l’Italie. Mais ces états vertueux avaient finalement fini par céder à condition sans équivoque qu’une clause sur l’état de droit y soit insérée. Il s’agit là d’une suspension des versements d’aides en cas de violations de l’état de droit et de la démocratie. Dans le collimateur de ses états, la Pologne et la Hongrie, pays déjà mis en cause pour différents cas d’atteinte à l’indépendance de la justice et des médias.

L’ultime blocage ?

Le 16 novembre, la réunion des ambassadeurs européens avait notamment pour objectif de faire adopter le dispositif permettant aux parlements nationaux d’autoriser la Commission européenne à financer le plan de relance. Mais la Pologne et la Hongrie l’ont pris en otage. En mettant leur veto, les deux pays ont bloqué les textes qui requièrent la majorité. Budapest et Varsovie clament à l’outrepassement des droits de l’UE sur leur souveraineté nationale. Au printemps, ils avaient déjà annoncé qu’ils bloqueraient sur cette question. Ils ont mis leur menace à exécution hier en mettant leur veto. Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, s’en justifiait d’ailleurs il y a quelques jours. Il déclarait « Nous n’avons pas créé l’UE pour avoir une deuxième Union soviétique ». Côté polonais, c’est le Vice-ministre de la Justice, Michal Wojcik, qui s’est exprimé sur le sujet qu’il considère comme un « moment clé de notre histoire : combien vaut la souveraineté, un milliard, plusieurs douzaines de milliards, plusieurs centaines de milliards d’euros ? Pour nous, cela n’a pas de prix ».

Ces différents blocages renvoient plus généralement à une question philosophique sur la conception de l’Europe et sur le rôle que doit jouer Bruxelles. Un soutien ou un garde-fou face à des états dépensiers ou des états dits « nationalistes » ? Pour l’heure, la question reste de savoir si ces états vont plier face aux négociations, dans un climat d’urgence renforcé par les reconfinements successifs des pays européens. Le plan de relance ne pourra, dans tous les cas, pas débuter en avril comme initialement annoncé. Les premiers versements débuteront à la fin du printemps 2021 si le plan parvient à être adopté.

Sources :

Les Echos, « Plan de relance européen : le choix fort et très politique de von der Leyen », le 27 mai 2020.

Le Monde, « La Hongrie et la Pologne bloquent le plan de relance européen », le 17 novembre 2020.

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Claire POTIN

Après une licence de droit à l'Université d'Orléans, Claire Potin s'est formée en sciences politiques et relations internationales à l'Université Jean Moulin de Lyon III puis à Sciences Po Aix. Elle est actuellement vacataire au Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.

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