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Le programme Bolsa Família

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Le programme est la figure de proue d'une politique volontariste de lutte contre la pauvreté
Le programme est la figure de proue d’une politique volontariste de lutte contre la pauvreté

Se déroule en ce 5 octobre 2014 le premier tour de l’élection présidentielle brésilienne. Bien que contrariée par la percée de Marina Silva, de récurrentes affaires de corruption et un premier semestre de récession, Dilma Roussef demeure favorite, tant sa politique volontariste héritée de son précédesseur et mentor Lula a permis à de nombreux brésiliens de sortir de la pauvreté. L’occasion de revenir plus en détails sur le programme phare de cette politique, Bolsa Família.

Le programme Bolsa familia a été créé en janvier 2004, sous la première présidence Lula, pour regrouper l’ensemble des programmes de redistribution existant jusqu’alors. Le principe est simple : une aide financière est versée tous les mois à chaque famille ciblée, mais condionnée à l’assiduité des enfants à l’école et à la mise à jour de leurs vaccinations obligatoires. Il est adressé aux familles pauvres (entre 77 et 140 reais mensuels per capita) et extrêmement pauvres (moins de 77 reias mensuels per capita). Les sommes accordées varient selon que l’on soit dans le premier ou dans le second groupe mais dans l’ensemble on peut retenir que chaque enfant vacciné et scolarisé donne droit à 32 reias, 38 dans le cas d’un adolescent (16-17 ans). Près de 14 millions de foyers brésiliens en profitent aujourd’hui, pour qui le programme fait désormais office de revenu fixe, quasi-équivalent d’un revenu minimum.

La logique du programme s’articule en deux temps, avec d’abord une classique redistribution des revenus en vue d’éradiquer la pauvreté. Cependant, la conditionnalité, qui vise à donner un accès à l’éducation et aux systèmes de santé, apporte son originalité au programme. Plus qu’une simple aide obéissant à un schéma top/down, le programme vise à sensibiliser les foyers les plus pauvres aux bienfaits de l’éducation et du système de santé de manière à créer non pas une situation de dépendance vis-à-vis des pouvoirs publics, mais bien une dynamique vertueuse d’accès à la formation et à la santé et donc, in fine à la classe moyenne.

Cet engagement dans le temps correspond à une conception globale de lutte contre la pauvreté. En plus de la santé et de l’éducation, on peut ainsi citer l’accès au logement, favorisé par le programme « Minha casa minha vida ». Egalement mis en place en 2009 par Lula, prolongé en 2011 par Dilma Roussef, il devrait à la fin 2014 et depuis son lancement, avoir permis la construction de près de trois millions d’habitations. Il permet aux personnes avec moins de 1600 reias bruts mensuels de devenir propriétaire en 10 ans avec une participation mensuelle de 5% du salaire (avec participation minimale de 25 reias). Un projet d’autant plus nécessaire que le pays connaît, du fait du modèle dominant d’agro-business, un fort exode rural entraînant une flambée des prix de l’immobilier en zone urbaine et périurbaine.

Finalement, malgré des critiques concernant l’utilisation électoraliste du programme ou le développement d’une forme d’assistanat, un consensus existe, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, pour reconnaître que le programme représente un succès majeur. Il a été le fer de lance du mouvement qui, initié dès la fin des années 90 mais incarné par Lula dans les années 2000, a permis à 30 millions de brésiliens de sortir de la pauvreté.

Cyniquement, le défi du nouveau gouvernement à venir consistera à poursuivre cet effort contre la pauvreté tout en intégrant les revendications (réforme de l’éducation, investissement dans les infrastructures, meilleurs services publics…) des nouvelles classes moyennes et urbaines qu’il a lui-même contribué à faire émerger.

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