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La politique étrangère de Jean-Luc Mélenchon : un gaullisme de gauche ?

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Après sa campagne présidentielle de 2012 avec le Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon est à nouveau présent en 2017 avec son mouvement de « La France Insoumise ». Le programme international de « JLM » oscille entre positions altermondialistes avec une présence importante des problématiques écologiques et des questions d’ordre géostratégique, qui concernent notamment les relations avec les États-Unis et la Russie. À la question du souverainisme qui revient sans cesse à droite, Jean-Luc Mélenchon préfère y répondre par de l’indépendantisme. Et si le candidat a présenté plusieurs propositions pour améliorer l’état des Relations Internationales, c’est par son analyse qu’il fédère. Son discours d’une heure, prononcé fin mars à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) a permis au candidat de présenter sa vision de la politique étrangère, en voici quelques points.

Tout d’abord, il analyse la période de désordre géopolitique actuelle et à venir, comme la résultante de trois menaces. La première menace étant le désordre climatique, qui est à l’origine des grands flux migratoires, des flux difficilement contrôlables et qui mèneront à des tensions dans les pays occidentaux, mais également dans les pays du « Sud ».
Il pointe également du doigt les politiques productivistes, la course aux matières premières, responsables en partie du déchirement au Moyen-Orient. Le candidat de « La France insoumise » juge que « Si vous voulez comprendre les guerres de ces dix dernières années, suivez les pipelines ». En effet, si les raisons économiques ne peuvent expliquer la totalité de tous les conflits, il y en est souvent question.
Enfin, dernière menace pointée du doigt par Jean-Luc Mélenchon : les États-Unis. Il s’appuie à la fois sur des arguments économiques et géopolitiques. Il dénonce ainsi le déversement du dollar sur l’économie mondiale et l’utilisation massive de la planche à billet par Washington. Il fustige la politique interventionniste des États-Unis, rappelant leur hégémonie, notamment dans les dépenses militaires.

Pour ce qui est de la Russie, c’est certainement le point qui le distingue le plus de son concurrent socialiste Benoit Hamon, en matière de politique étrangère. Alors que ce dernier est certainement le candidat le plus dur envers les positions russes, Jean-Luc Mélenchon fait de la Russie un partenaire, parfois un adversaire, mais jamais un ennemi, peu importe la nature du régime. Ce point fait également la différence avec les autres candidats à tendance « russophile ». Il soutient certes un dialogue politique avec Moscou, mais ne trouve pas d’excuses aux excès autoritaristes du Kremlin. Si les liens idéologiques nationalistes relient (grossièrement) Marine Le Pen et Vladimir Poutine, si la mode conservatrice de Moscou trouve échos en François Fillon, rien de tel du côté de Jean-Luc Mélenchon. Il a d’ailleurs apporté son soutien à un opposant d’extrême gauche aujourd’hui en prison, son mouvement a également relayé les récentes informations sur la situation des homosexuels en Tchétchénie.
Mais comme il aime le répéter « Si de Gaulle s’est entendu avec Staline et Mao, nous pouvons discuter avec Poutine, au nom de la paix en Europe ». Pour mettre en place cette politique de non-alignement, Jean-Luc Mélenchon propose la sortie de l’OTAN et l’organisation d’une conférence internationale pour rediscuter des frontières post-soviétiques, à l’origine des tensions actuelles en Europe de l’est.

Ce qui étonne chez Jean-Luc Mélenchon, c’est son analyse globalement pragmatique de la situation. À la différence des analyses idéalistes qui caractérisent bien plus la gauche et dont Benoit Hamon est le meilleur représentant. À travers son analyse et ses propositions, Jean-Luc Mélenchon revendique un héritage issu du « gaullisme mitterrandien ». Un héritage utilisé dans un objectif précis : passer du statut d’homme de gauche à celui d’homme d’État.

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Fabien HERBERT

Fabien Herbert est Président des Yeux Du Monde et rédacteur géopolitique pour l'association depuis mars 2016. Formé à l’Université Catholique de Louvain, Fabien Herbert est journaliste et analyste spécialisé en relations internationales. Il s’intéresse notamment au monde russophone, au Moyen-Orient et à l'Asie du Nord-Est.

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