ActualitésEuropePays scandinaves

La Suède passe l’arme à gauche

Shares

Gouvernée par le centre-droit (par ailleurs plus « à gauche » que bon nombre de gouvernements socialistes européens) depuis huit ans, la Suède vient de donner une courte majorité à la gauche qui a régné sur la Suède durant des décennies.

Le nouveau Premier Ministre suédois S. Löfven a des partenaires à rassembler et tout un pays à rassurer...
Le nouveau Premier Ministre suédois S. Löfven a des partenaires à rassembler et tout un pays à rassurer…

Imaginez que l’Europe vit sa pire période économique depuis 1945. Dans ce contexte, la plupart des campagnes électorales se concentrent sur la réduction des déficits ou la recherche de la croissance. En Suède, aucun de ces thèmes n’a dominé les semaines de campagne. Non, car échecs des privatisations, amélioration du système de santé et scolaire voire immigration ont été les thèmes majeurs d’une campagne faiblement remportée par la gauche. Aussi incroyable que cela puisse paraître, la Suède et sa prospérité quasi-unique en Europe de nos jours a donc choisi l’alternance. La faute à une mauvaise gestion de la privatisation des systèmes éducatifs et de santé, si chers aux petites têtes blondes depuis les réformes engagées par Olof Palme dans les années 1960.

Pour beaucoup, le programme des socialistes peut apparaître comme une hérésie : réduction du temps de travail hebdomadaire, meilleure indemnisation des chômeurs, meilleur accueil des étrangers. Autant dire un programme qui fait de la Suède un pays complètement à part du reste du continent. Mais, pour un pays qui réussit depuis de nombreuses années maintenant, nous ne sommes plus à une surprise près.

Le centre-droit a donc échoué dans la poursuite des mesures de libéralisation menées depuis la grave crise du début des années 1990. Il a notamment introduit la possibilité à quiconque de choisir son système de santé ou l’école dans laquelle il pouvait placer ses enfants. Mais, dans un pays parangon du socialisme (le vrai) en Europe durant la Guerre Froide, les acteurs privés ont agi « à l’américaine » : la quête du profit a donné vie à un système éducatif à double vitesse, menant certains établissements à la banqueroute et participant au renforcement des inégalités sur place. Or, la Suède est probablement l’un des derniers pays sur Terre à concrètement mettre la lutte contre les inégalités au centre du débat public. Sujet ultra-sensible donc !

Les Socialistes incapables de gouverner seuls, le nouveau gouvernement sera donc assez hétéroclite autour de représentants du parti Vert et du parti féministe (agressives qui plus est). Dans un pays où la pression fiscale est plus importante qu’ailleurs, les impôts devraient augmenter, mais sans que cela ne pousse les riches Suédois à l’exil, comme cela est le cas plus au Sud du continent.

Non, la Suède n’est pas peuplée de « Bisounours », mais plutôt « d’hédonistes passifs » !

Après une élection unique en Europe, il y a néanmoins un score qui est partagé en Suède et ailleurs : le score à deux chiffres des Démocrates de Suède, excédés par des vagues migratoires engendrant parfois leur lot de violences dans certaines banlieues et surfant sur le traditionnel rejet de l’étranger toujours présent chez une (faible) proportion d’habitants.

Il sera plus qu’intéressant de voir la gestion de cette nouvelle coalition de gauche, absente du pouvoir depuis presqu’une décennie, et qui devra, entre autres, gérer les rapports économiques entretenus par la Suède avec le reste d’un continent amorphe et en crise. Qui sait, nos amis Suédois sauront montrer au reste de l’Europe ce qu’est un « social-libéralisme » qui n’échoue pas…

Shares

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *