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Robert Mugabe : de héros à tyran, la fin d’une époque

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Le Zimbabwe vit un bouleversement politique. Le 15 novembre dernier, un officier en uniforme annonce à la télévision que l’armée prenait le contrôle de du pays. Il précise qu’il ne s’agit pas d’un coup d’État. Néanmoins, une semaine plus tard, le Président de la République, Robert Mugabe, présente sa démission.

Robert Mugabe, 93 ans, était à la tête du Zimbabwe depuis plus de 37 ans. Il a été le chef d’État en exercice le plus vieux du monde. Figure de la lutte pour l’indépendance et de l’anti-impérialisme, il a souvent été considéré comme le « père de la nation ». Son bilan reste néanmoins marqué par une dictature sanglante et une économie ruinée.

Héros de l’indépendance

Dès les années 1960, il s’engage dans la lutte pour l’indépendance de l’ex-Rhodésie du Sud. Il revendique son appartenance au marxisme. Après 10 ans passés en prison, il va se réfugier au Mozambique d’où il mène la lutte armée contre le gouvernement de Ian Smith. En 1980, son parti, l’Union Nationale Africaine du Zimbabwe (ZANU) remporte les « élections multiraciales », à l’issue desquelles il devient Premier ministre. Ses premières années à la tête du pays sont prometteuses : « Camarade Bob » comme on le surnommait fait construire des écoles, des hôpitaux et des logements. Le taux d’alphabétisation au Zimbabwe atteint aujourd’hui les 83%, tandis que l’IDH est lui de plus de 0,5 – le plaçant devant la moitié des pays d’Afrique subsaharienne. De plus, il adopte une politique de réconciliation avec les blancs qui lui vaut une excellente réputation sur la scène internationale.

Un dictateur farouche

Rapidement, le régime de Mugabe tourne à la dictature. Les libertés individuelles sont opprimées, la liberté d’expression est quasi-inexistante, les droits de l’Homme bafoués, certains opposants sont même torturés. L’une des mesures phares de sa période de règne a été la réforme agraire. Au début des années 2000, le régime est affaibli. Pour essayer de regagner en stabilité, Mugabe décide de lancer une réforme agraire consistant à exproprier 4000 fermiers blancs, afin de redistribuer leurs terres à des populations noires. Cette réforme fût marquée par des violences inouïes qui ont poussé la plupart des fermiers blancs à quitter le Zimbabwe. Cela a provoqué l’indignation de la communauté internationale et la mise du Zimbabwe au ban des nations. Son règne fût aussi marqué par des prises de positions choquantes, notamment sur sa conception de sa relation avec la nation (« Le Zimbabwe m’appartient »), ou encore son admiration prononcée pour Adolf Hitler (« Je serai le Hitler de notre époque »). Il a aussi exprimé à maintes reprises, notamment à la tribune de l’ONU, son homophobie assumée. Son bilan économique reste quant à lui catastrophique, avec un taux de pauvreté qui atteint les 80% de la population ainsi qu’un taux de chômage dépassant les 90%.

Une fin mouvementée mais sans violence

Tout a commencé le 5 novembre, lorsque Grace Mugabe, épouse du président, a annoncé dans un rassemblement de la jeunesse du parti au pouvoir être prête à succéder à son époux. Le lendemain, Emmerson Mnangagwa, vice-président et homme fort du régime fut limogé. R. Mugabe semblait donc préparer le terrain pour sa femme. L’armée décide donc d’intervenir avec le coup d’État maquillé du 15 novembre dernier. Des manifestants envahissent alors les rues de Harare demandant la démission du président. Mugabe fût aussitôt expulsé de son parti et remplacé par E. Mnangagwa. Tout portait alors à croire que sa démission était imminente. C’était sans compter sur la ténacité du vieil homme de 93 ans qui lors d’une allocution télévisée le dimanche 19 novembre au soir a affirmé qu’il restait à la tête de l’État et qu’il présiderait le congrès de son parti. Cependant, deux jours plus tard, alors que le Parlement préparait une procédure de destitution, le dictateur de 93 ans a annoncé, par le biais d’une lettre envoyée au président du Parlement qu’il démissionnait.

Il laisse derrière lui un pays ruiné économiquement et opprimé politiquement. Sa fin sonne aussi probablement la fin d’une guerre de succession entre son épouse, Grace, et son vice-président Emmerson Mnangagwa, qui semble être bien parti pour prendre les rênes du pouvoir.

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