L’Amérique a-t-elle encore une capacité d’influence sur Pékin ?
Demain débutera la visite officielle de Hu Jintao aux Etats-Unis, l’occasion pour Obama de rappeler à l’ordre son homologue chinois sur les quelques questions fondamentales qui dominent aujourd’hui les discussions entre les deux pays : la sous-évaluation du yuan, les droits de l’Homme, Taïwan, la Corée du Nord, etc. Alors que le débiteur s’apprête une nouvelle fois à faire la leçon à son créancier, une question se pose : l’Amérique a-t-elle les moyens d’imposer sa volonté à Pékin ?
Une chose est sûre : les Etats-Unis prétendent toujours tenir leur rôle de gendarme. Ils défendent les droits de l’Homme et la liberté d’expression en exprimant des positions de principe sur le Dalaï-lama, l’emprisonnement des dissidents politiques ou la censure sur Internet, et se fâchent lorsque la Chine, en conservant une monnaie sous-évaluée, contrevient aux règles de libre-échange qu’ils ont eux-même fixées. Pourtant il suffit de voir avec quelle facilité les dirigeants chinois contournent les menaces de sanctions américaines pour comprendre qui tient véritablement les rênes en Chinamérique.
Depuis l’année dernière le Congrès américain brandit une nouvelle arme pour forcer Pékin à la réévaluation : un projet de loi prévoyant une montée des tarifs douaniers sur les produits chinois dans le cas où le pays ne consentirait pas à augmenter le cours de sa monnaie. La sanction, qui devait tomber en avril dernier, a été évitée par un simple communiqué de la Banque de Chine annonçant la fin du lien fixe entre le yuan et le dollar. Un mot de la Banque de Chine et voilà que Pékin obtient un délai. Une promesse qui n’engageait pas le pays à beaucoup, d’ailleurs depuis juin dernier la hausse enregistrée du yuan n’est que de 3,5% !
Les Etats-Unis discutent, formulent des exigences, adressent leurs reproches et la Chine, elle, agit. Très peu de pays ont connu un développement militaire aussi accentué ces dernières années avec, dernière avancée en date, la construction d’une immense base navale à Sanya, à l’extrême Sud du territoire, qui pourra accueillir les 24 sous-marins chinois et les déployer en Asie du Sud-Est. De quoi contester la suprématie de 7ème flotte américaine dans la région…
Mais Washington n’est pas la vraie menace aux yeux de Pékin. Outre le fait que les Etats-Unis représentent démographiquement peu de choses comparés à un pays de plus d’un milliard d’habitants, l’avance technologique dont disposent les Américains tend à se réduire, notamment du fait d’entreprises américaines et européennes qui souvent n’hésitent pas à transmettre leur savoir à des firmes chinoises pour profiter de coûts de production moins élevés. Les Chinois, pour parvenir au sommet, devront surtout apprendre à gérer les inégalités, les revendications démocratiques et le risque de surchauffe de leur l’économie, car le principal obstacle à l’expansion chinoise vient de l’intérieur.