Donald Trump entame une tournée asiatique stratégique pour son leadership
Donald Trump a entamé dimanche une tournée dans cinq pays asiatiques : le Japon, la Corée du Sud, la Chine, le Vietnam et les Philippines. En plus de renforcer des liens diplomatiques en déclin ou au contraire prometteurs, les États-Unis désirent mettre le dossier nord-coréen au centre des discussions et rassembler les nations d’Asie de l’Est. Tour de table des perspectives pour Washington, qui s’annoncent pour certaines particulièrement délicates.
Les étapes de la tournée de Donald Trump représentent des pays aux liens historiques forts avec les États-Unis, exception faite de la Chine et du Vietnam. Ayant connu un décollage économique récent, ce dernier se développe en même temps que sa dépendance aux deux premières puissances économiques mondiales. Au vu des relations compliquées entre Hanoï et Pékin face aux ambitions chinoises en mer de Chine méridionale et dans la région en général, Donald Trump effectue ainsi une visite stratégiquement judicieuse. Le choix des Philippines comme autre étape en Asie du Sud-Est est également bien pensé : fin 2016, le gouvernement de Rodrigo Duterte avait rompu son alliance avec les États-Unis et s’était tourné vers le géant chinois. Le président philippin avait demandé le départ des forces américaines présentes sur son sol. Cette volte-face s’était faite dans le cadre d’un bras de fer entre un partenariat trans-pacifique (TPP[1]) contraignant notamment en termes de droit du travail et de normes environnementales; et un partenariat économique régional global (RCEP[2]) bien plus souple. Le TPP étant désormais pratiquement enterré, il est important pour les États-Unis de s’investir à renouer des rapports forts avec Manille.
La Corée du Nord : entre rassemblement et discorde
Le Japon, premier arrêt dans cette tournée asiatique américaine, s’est révélé être une visite cordiale et sans embûches. En effet, Shinzô Abe soigne ses rapports avec Washington afin de conserver un allié de choix face à son voisin chinois ambitieux, et maintenir sa position de puissance régionale. De plus, le Premier Ministre japonais a adopté une position de fermeté face à la menace nord-coréenne pour regagner le soutien d’une opinion publique divisée. Des relations renforcées avec les États-Unis ne peuvent ainsi qu’appuyer cette stratégie. Donald Trump passera ensuite une journée en Corée du Sud, où il prononcera un discours devant l’Assemblée nationale. Cette fois-ci, les approches entre les présidents américain et sud-coréen face à la Corée du Nord se démarquent : même s’il reste favorable à des sanctions, Moon Jae-In désire un dialogue avec Kim Jong-Un et demeure en cela bien moins coercitif que le gouvernement américain. Il sera donc très intéressant d’écouter le discours de Donald Trump et le bilan des discussions entre les deux dirigeants dans un contexte aussi tendu.
La rencontre entre Xi Jinping et Donald Trump portera aussi en grande partie sur le dossier nord-coréen. Le président américain souhaite convaincre son homologue chinois de montrer plus de vigueur dans ses pressions sur la Corée du Nord. Cependant il est peu probable que cela aboutisse. Dans ce contentieux, la Chine souhaite clairement démontrer sa capacité diplomatique et ne pas laisser un leadership américain s’installer. De plus, en cas d’effondrement du régime nord-coréen, une réunification avec la Corée du Sud pourrait signifier un nouveau pays tourné vers Washington aux portes de Pékin, et un afflux massif de réfugiés à gérer pour le gouvernement. La dictature de Kim Jong-Un demeure donc un pion géopolitique important que Xi Jinping ne laissera pas si facilement tomber.
Enfin, le président américain avait annoncé il y a quelques jours vouloir rencontrer Vladimir Poutine durant son voyage. Cela se ferait en marge du sommet de l’Apec qui se déroule du 6 au 11 novembre à Da Nang, Vietnam. Donald Trump a indiqué que la discussion concernerait là encore le conflit nord-coréen, sur lequel l’aide de la Russie serait souhaitée afin d’accroître la pression sur la dictature.
[1] Trans-Pacific Partnership, un traité de libre-échange réunissant douze pays de la zone Pacifique. Il représentait le cœur de la politique de pivot asiatique de Barack Obama.
[2] Regional Comprehensive Economic Partnership, traité de libre-échange lancé par l’ASEAN mais devenu un élément crucial dans la stratégie chinoise pour contrer le leadership américain en zone Pacifique.