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Érythrée : la dictature oubliée

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Issayas Afeworki, héros de l'indépendance devenu président controversé
Issayas Afeworki, héros de l’indépendance d’antan, aujourd’hui à la tête d’un Etat fermé et totalitaire

Médiatisée ponctuellement, en raison du nombre de ses ressortissants qui franchissent la Méditerranée pour le continent européen, l’Érythrée demeure un pays peu connu. A sa tête depuis près de vingt ans, le président Issayas Afeworki mène une politique drastique et totalitaire valant au pays d’être qualifiée de « Corée du Nord de l’Afrique ».

Après la décolonisation italienne, le territoire correspondant à l’Erythrée actuelle qui jouissait d’un statut particulier depuis 1890, est fédéré à l’Ethiopie par une décision de l’ONU en 1952. Allant au-delà de ses prérogatives, l’Ethiopie annexe l’Erythrée en 1962. Débute alors une guerre d’indépendance menée notamment par le Front populaire de libération érythréenne (FPLE) à partir de sa création en 1971. Issu de l’union de différents groupes de libération, ce mouvement est dirigé par Issayas Aferworki. Si ses objectifs premiers sont militaires et politiques (la conquête et l’indépendance du territoire érythréen), ce groupe d’obédience marxiste a également un projet de long terme et développe des services sociaux (écoles, hôpitaux) afin d’améliorer les conditions internes du futur Etat dans une logique d’autosuffisance. Le FPLE mène en ce sens une conquête territoriale et parvient à conquérir plusieurs villes à la fin des années 1980 (Afabet, Tessenei et Massawa). La prise d’Asmara en 1991 constitue l’étape finale de la guerre civile.

La mise en place d’un système totalitaire

A l’issue du conflit, un gouvernement provisoire est créé et un référendum d’autodétermination est organisé en avril 1993. La population accepte à 99% la souveraineté érythréenne sur son territoire et l’indépendance , proclamée le 24 mai 1993. Issayas Afeworki, héros de l’indépendance prend la tête du pays, est alors vu par les occidentaux comme le symbole de « la renaissance africaine ». Il instaure peu à peu un régime autoritaire autour du Front populaire pour la démocratie et la justice, parti unique du pays depuis 1994 issu du FPLE. Aucune élection n’est organisée, l’économie est centralisée et la liberté d’expression est fortement contrôlée. De même la Constitution adoptée en 1997 n’est pas appliquée. En 1998, après la pénétration de soldats érythréens sur les territoires frontaliers (région de Badme et du Tigré), les tensions latentes entre les deux pays se transforment en véritable conflit faisant plus de 100 000 morts. Le conflit s’achève en juin 2000 avec un accord de paix global (accords d’Alger), une opération de maintien de la paix, la MINUEE, contrôle la zone de sécurité temporaire frontalière créée et une commission frontalière est mise en place en 2002 afin d’accorder les territoires à chaque partie. Si la région de Badme a été attribuée à Érythrée, son statut demeure incertain.

Ce conflit frontalier a fortement contribué au renforcement du caractère autoritaire du pays. Le différend entretenu avec l’Ethiopie a ainsi servi de fondement à la décision de mettre en place un service national d’une durée illimitée. Le pays fait ainsi figure de prison à ciel ouvert, d’où fuient régulièrement des milliers de personnes afin d’éviter la conscription. En 2001, l’emprisonnement de membres du parti ayant évoqué la possibilité d’assouplir le régime, notamment en appliquant la Constitution de 1997, ainsi que l’arrestation de nombreux journalistes en ayant fait l’écho met en exergue le caractère liberticide du régime.

Le dernier rapport des Nations Unies concernant la situation des droits de l’homme dans le pays conforte l’orientation totalitaire du pays (exactions extrajudiciaires, travail forcé), mais ne semble pas encore être à même de susciter une approche nouvelle de la communauté internationale.

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