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La Révolution énergétique cubaine : quelle indépendance pour Cuba ?

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A l’image de nombreux aspects de son économie, le secteur énergétique cubain a connu de profondes mutations au cours de ces dix dernières années. Pays insulaire, fortement dépendant des énergies fossiles et des importations en pétrole vénézuélien, Cuba a pourtant fait le choix de s’engager dans la voie de la transition énergétique.

Présentation du secteur énergétique cubain

Le secteur énergétique cubain est marqué par une profonde dépendance aux énergies fossiles. En 2013, 96% de la production d’électricité cubaine provenait d’énergies fossiles (pétrole majoritairement et gaz, dans une moindre mesure). Paradoxalement, le pays dispose de relativement peu de ressources en hydrocarbures[1] et dépend en grande partie de ses importations du Venezuela.  Cuba s’est néanmoins doté d’un appareil productif qui lui permet de maîtriser l’amont et l’aval de la chaîne de valeur (deux plateformes de prospection en eaux profonde « Scarabeo 9 » et « Songa Mercur », création d’une nouvelle raffinerie dans la province de Matanzas et des centrales thermiques dans les provinces de Cienfuegos et de Santiago de Cuba). Le secteur électrique cubain est caractérisé par la grande vétusté de son parc de production, datant de l’ère soviétique. La majorité des centrales thermoélectriques ne tourne pas à plein régime et ne répond plus aux normes sécuritaires et environnementales. Un quart de l’électricité est produite localement par des groupes électrogènes fonctionnant au diesel : solution précaire, dangereuse et polluante.  A cela s’ajoute un déficit d’interconnexion des zones rurales aux réseaux de distribution, avec de nombreuses pertes (14% de l’électricité produite). Bénéficiant de conditions climatiques très favorables avec de forts taux d’ensoleillement et une bonne exposition aux vents, les énergies renouvelables ne représentent que 4% de la production électrique du pays.

Cuba : victime collatérale de la crise du Venezuela

Fortement affecté par la baisse des cours et l’effondrement des prix du pétrole depuis l’année 2014,  le Venezuela dont 50% de l’économie dépend de la rente pétrolière, n’est plus en mesure d’approvisionner Cuba. Premier exportateur de brut latino-américain détenant les plus importantes réserves mondiales, le Venezuela avait initié l’Alliance Petrocaribe, visant à approvisionner en pétrole à bas prix Cuba ainsi que 17 autres pays latino-américains, afin de renforcer l’intégration latino-américaine contre l’influence étasunienne. Cuba bénéficiait ainsi d’un pétrole à bas coût en échange de l’envoi de médecins au Venezuela. Si cet accord de coopération a permis à de nombreux pays de renforcer leur développement économique, il a paradoxalement accru la dépendance des pays, notamment insulaires, aux importations pétrolières. Ainsi, la crise de 2014 a fait chuter de près de 40% les importations de pétrole à Cuba. En d’autres termes, ce sont les deux tiers de sa consommation de pétrole journalière qui est affectée par cette crise énergétique. Pour pallier cette situation de pénurie, qui risque d’aggraver la précarité énergétique et sociale du pays Cuba doit mener de front deux opérations.  A court terme, le pays doit puiser dans ses propres ressources pétrolières afin de continuer à alimenter ses besoins internes. A long terme, Cuba a choisi de développer des sources d’énergies alternatives afin de réduire sa dépendance énergétique -et économique- au pétrole vénézuélien.

La Révolution énergétique cubaine…vers l’indépendance énergétique ?

En 2004, deux ouragans successifs frappent la partie orientale de l’île, engendrant de nombreuses pénuries d’électricité. Près d’un million de personnes seront privés d’électricité pendant plus de 10 jours

Conscient de sa situation précaire, le régime cubain a amorcé depuis une dizaine d’années une profonde mutation de son secteur énergétique avec des objectifs ambitieux en termes de transition énergétique et de lutte contre le réchauffement climatique. Cuba a ainsi récemment amorcé sa transition énergétique, qu’elle a qualifié de revolucion energetica, tant les défis semblent de taille pour ce petit pays. Le plan repose sur cinq piliers et comprend entre autres une augmentation de la part des énergies renouvelables, une réduction de la consommation d’énergies fossiles et le développement d’initiatives citoyennes. A l’aide d’un plan d’investissement de 3,7 milliards de dollars, Cuba entend faire porter la part d’énergies renouvelables de 4 à 24% de son mix énergétique, à horizon 2030. Le pays entend également valoriser ses immenses réserves de cannes à sucre pour en extraire de la biomasse : 19 centrales bioélectriques sont également en construction. Cuba souhaite également développer de nouveaux secteurs de son économie, comme la production d’éthanol issu de la canne à sucre pour les biocarburants. Enfin, Cuba a entrepris la rénovation de ses réseaux de distribution et a réparti dans le pays près de 2000 microcentrales électriques visant à pallier les éventuelles coupures et défauts du réseau.

Cependant, la transition énergétique cubaine pourrait bien engendrer de nouvelles formes de dépendances. Partenaire historique de Cuba, la Russie s’est engagée à annuler 90% de la dette de Cuba (contractée à l’époque soviétique) et a présenté en 2014 un plan d’investissement de 1,6 milliards de dollars prévoyant notamment la construction de 4 nouvelles centrales thermiques (l’île en compte 11). Par ailleurs, la Chine a récemment annoncé son intention de renforcer ses investissements à Cuba, notamment dans le secteur des énergies renouvelables. Si les investissements étrangers pour la transition énergétique sont de bon augure pour Cuba, le risque d’une dépendance aux technologies étrangères de pointe est pourtant bien réel. Un des défis de Cuba pour sa transition énergétique sera de concilier son ouverture aux investissements internationaux avec la préservation de son indépendance, fondement de l’identité cubaine.

 

 

[1] Les gisements en eau profonde dans le Golfe du Mexique et de Varadero à 140 Kms à l’Est de La Havane n’ont pas permis d’approvisionner Cuba en quantités suffisantes

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