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Elections ukrainiennes : avec Moscou, le mariage de raison ?

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Les dernières élections législatives ont confirmé la domination du Parti des régions pro-russe sur la scène politique ukrainienne. Pendant que l’Europe et l’OSCE s’arrêtent encore aux considérations démocratiques, l’Ukraine se tourne (très) lentement vers le voisin russe.

C’est un oui franc et massif qu’a donné le peuple ukrainien au président Ianoukovitch et à son Parti des Régions, celui-ci conquérant plus de la moitié des sièges du Parlement. Ce résultat confirme donc le choix opéré par le Président depuis son élection en 2010 : se rapprocher de Moscou (mais pas trop, pour ne pas effrayer les fortes minorités nationalistes du pays, qui ont obtenu plus de 10% des votes hier) sans trop distendre les liens avec l’Union Européenne, en attendant de rejoindre l’Union dans un futur proche. Néanmoins, même s’il apparaît renforcé, Ianoukovitch demeurera face à un dilemme que même le Cid cornélien ne lui aurait guère envié.

D’un côté, l’Ukraine, par sa situation géographique et son histoire, est naturellement attirée par la Russie. Le régime politique ukrainien tend à se rapprocher du modèle russe, celui d’une « démocratie contrôlée », où certaines libertés sont ôtées au peuple tout en tentant de maintenir une paix sociale. Néanmoins, l’Ukraine refuse toujours de rejoindre l’union douanière proposée par la Russie, en contrepartie de quoi les Russes ont revu à la hausse le prix du gaz fourni au voisin ukrainien, grevant ostensiblement le budget gouvernemental.

De l’autre côté, l’approfondissement des relations économiques avec l’UE pouvait faire penser que l’intégration de ce qui constituerait le plus grand pays de l’Union serait proche. Aujourd’hui, ce processus est quasiment gelé. La raison ? Le manque de pratiques démocratiques en Ukraine, selon l’Union. En effet, Ianoukovitch a commis une double erreur. La première était de croire qu’il pouvait faire comme Poutine et emprisonner un grand opposant (V. Khodorkovski, ex-dirigeant de Ioukos, dans le cas russe) sans s’attirer des foudres internes et externes. Or, I. Timochenko, ex-première Ministre, est un grand symbole, à la fois dans et à l’extérieur de l’Ukraine. Deuxio, il a cru pouvoir disposer d’autant de monnaies d’échange que son homologue russe pour « s’acheter » les silences occidentaux sur les carences démocratiques. Or, l’Ukraine n’a pas l’arme du gaz pour faire taire les requêtes démocratiques européennes.

Ianoukovitch ne sera pas le nouveau Loukachenko !

Au final, les prochaines années devraient être celles du statu quo pour la politique extérieure ukrainienne. Ianoukovitch devra désormais s’atteler à rétablir les versements du FMI, coupés depuis la fin 2010 par manque de réformes. Le FMI exige ainsi la hausse du prix du gaz vendu en Ukraine, ce que Ianoukovitch, électoralement, ne pouvait se permettre, se contenant de demander aux Russes de baisser leurs prix de vente.

Qu’aura-t-on dans les prochaines années : une Ukraine russe ou une Ukraine européenne ? Nul ne le sait. Et c’est cela qui rend l’étude des relations internationales aussi passionnante !

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