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32e Sommet de l’Union Africaine : entre espoirs et inquiétudes

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Les 10 et 11 janvier, le 32e sommet de l’Union Africaine (UA) s’est tenu, à Addis-Abeba, en Ethiopie. Parmi les événements marquants de cette édition : la passation de pouvoir entre le président rwandais Kagame et son homologue égyptien Sissi, la désignation de l’Afrique du Sud pour la présidence de 2020 et l’adoubement du président Congolais contesté Tshisekedi. Après une année de réformes, l’UA se dirige vers un futur plus incertain.

Photo de Sissi président égyptien et président de l'Union Africaine
Sissi saura-t-il faire passer les intérêts de l’Union Africaine avant ceux de son pays ?

Missionné en 2016 pour réformer l’UA, Kagame a fait la démonstration de sa volonté mais a rencontré de nombreux obstacles. Son bilan apparaît mitigé. L’une de ces mesures phares, assurer l’indépendance financière de l’organisation, est un succès partiel. En effet, afin de s’affranchir des aides étrangères, qui représentent plus de la moitié du budget, Kagame a proposé de prélever une taxe de 0,2% sur les importations des pays membres. Si 22 pays ont accepté cette mesure, l’Afrique australe, parmi laquelle l’Afrique du Sud, s’y est refusée. De même, le Nigeria n’a pas adhéré à la création d’une zone continentale de libre-échange, qui représente pourtant une avancée importante pour le commerce africain. Ainsi, l’opposition aux réformes par des poids lourds du continent a ralenti le processus.

Toutefois, Kagame est quand même parvenu à faire adopter certaines de ses idées. Le « fonds pour la paix », le premier du genre en Afrique, a récolté 80 des 400 millions de dollars prévus. Ce dernier permettra à l’UA de mener des missions de médiation, événement inédit pour l’organisation. Enfin, Kagame s’était fixé pour objectif de simplifier le mode de fonctionnement de l’UA. S’il a réussi à réduire le nombre de commissions, les Etats membres se sont opposés à la réforme de la nomination des commissaires, souhaitant préserver cette prérogative.

En définitive, la détermination du président rwandais a permis des avancées significatives, cependant, les Etats demeurent très attachés à leurs intérêts nationaux, ce qui complique tout processus de réforme.

Sissi à la tête de l’UA : la prévalence des ambitions nationales ?

A la suite de Kagame, le président égyptien Sissi a pris la tête de la gouvernance de l’UA. Certains ont exprimé leurs craintes quant aux ambitions personnelles du raïs. En effet, l’Egypte a perdu une partie de son influence régionale et internationale suite à la révolution de 2011 et des troubles qui ont suivi. Ainsi, ses voisins rivaux, tels que les pays du Golfe, la Turquie ou Israël, ont accru leur présence militaire en Afrique, une situation insupportable pour Sissi. De plus, la construction du Grand Barrage éthiopien de la renaissance est perçue comme une menace par Le Caire, qualifiant ce dossier d’enjeu de « sécurité nationale ». Ainsi, Sissi souhaite redonner à l’Egypte son rôle de puissance incontournable sur le continent. La présidence de l’UA risque d’être instrumentalisée par le raïs pour servir ses ambitions.

Egypte-UA : des intérêts divergents

Dans son premier discours, le président égyptien s’est voulu rassurant et a affirmé vouloir continuer les réformes commencées par son prédécesseur. Il concentrera son action sur trois axes majeurs : le développement des infrastructures, l’accélération de l’entrée en vigueur de la zone de libre-échange et la création d’emplois pour la jeunesse. Ces mots restent promesses en attendant de voir la réalité des actions du président. En effet, certains font remarquer que la taxe d’auto-financement de l’UA désavantage l’Egypte qui est en plein processus d’industrialisation et dont les besoins en matières premières et produits semi-finis sont importants. Ainsi, la question demeure de savoir si Sissi sera prêt à sacrifier les intérêts de son pays pour le bien de l’organisation.

Enfin, le dossier libyen pourrait constituer une ultime pierre d’achoppement. Encouragée par le succès de la médiation en Centrafrique, l’UA a pour ambition de lancer une mission similaire en Libye pour mettre fin au conflit qui dure depuis huit ans déjà. Or, Sissi soutient militairement le maréchal Haftar, l’opposant principal au gouvernement officiel de Tripoli. Cette alliance risque de compliquer les négociations.

Tshisekedi légitimé

Enfin, le 32e sommet a été marqué par l’arrivée de deux présidents fraîchement élus : Andry Rajoelina pour Madagascar et Félix Tshisekedi pour la République Démocratique du Congo. Ce dernier a fait l’objet d’accusations de fraudes électorales, un sujet qui n’a pas été évoqué une seule fois lors de la rencontre. Pourtant, la relation entre l’UA et Tshisekedi a connu des débuts tumultueux. En effet, au plus fort de la contestation électorale, l’organisation africaine a tenu un mini-sommet extraordinaire pour demander à la Cour constitutionnelle congolaise de suspendre la proclamation des résultats. La brouille désormais résolue, Tshisekedi a joui d’un accueil chaleureux alors que les interpellations de son opposant Fayulu aux dirigeants africains n’ont pas rencontré d’écho.

L’année 2019 sera une année de défi pour l’Union Africaine qui devra compter avec les ambitions personnelles de Sissi et une crédibilité écornée par son incapacité à se dresser contre les dirigeants non-démocratiques.

Sources

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/02/12/l-union-africaine-veut-prendre-la-main-dans-le-dossier-libyen_5422409_3212.html?xtmc=union_africaine&xtcr=8

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/02/11/reforme-de-l-union-africaine-paul-kagame-a-obtenu-des-resultats-mitiges_5421978_3212.html?xtmc=union_africaine&xtcr=11

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/02/11/a-la-tete-de-l-union-africaine-l-egypte-veut-se-reengager-sur-la-scene-continentale_5421969_3212.html?xtmc=union_africaine&xtcr=12

http://www.rfi.fr/afrique/20190210-32e-sommet-ua-enjeux-interrogations-sommet-transition

https://www.mediacongo.net/article-actualite-47432_les_3_points_marquants_du_32e_sommet_de_l_ua.html

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Clara JALABERT

Clara JALABERT est étudiante en Master International Security à l'école d'affaires internationales de Sciences Po. Elle se spécialise dans l'étude de l'Asie et des risques sécuritaires.

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