Opération Chammal, l’armée française en Irak
Dès septembre 2014, à l’initiative des États-Unis, commencent le rassemblement et l’intégration d’une large coalition internationale formée par 22 États dont le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, des pays européens et des pays arabes. Sa cible est Daech. Cette guerre ne dit pas son nom jusqu’à ce que les États-Unis officialisent leur entrée en guerre en Irak le 15 octobre 2014 – 3 ans après le départ des troupes américaines du pays – et la nomment « Inherent Resolve » (Détermination absolue). En vérité, les frappes américaines contre les positions de Daech avaient débuté le 8 août 2014. La France, membre de la coalition, lance l’opération Chammal.
En réponse à la demande du gouvernement irakien et dans le cadre de la Résolution 2170 du Conseil de sécurité des Nations unies, l’engagement français dans la lutte anti-terroriste franchit un cap avec la participation de l’armée française à l’opération Chammal, lancée le 19 septembre 2014. Le terme « chammal » désigne un vent de nord-ouest, parfois vecteur de tempêtes de sable, et qui souffle sur la région mésopotamienne. Placées sous l’égide du Coordination Air Operation Center américain (basé au Qatar) en relation avec l’État-major irakien, les missions aériennes françaises sont réalisées sous le contrôle opérationnel du commandant de la zone maritime de l’océan Indien (commandement de l’Alindien). Cette opération entre dans le cadre d’une guerre asymétrique opposant les forces armées d’une coalition d’États à une organisation terroriste transnationale qui bénéficie de la situation chaotique syrienne et de la faiblesse des autorités irakiennes pour étendre son emprise territoriale.
Les moyens engagés font de la France la seconde force de la coalition après l’allié états-unien : 400 militaires français, 9 Rafales, 1 avion de ravitaillement (C135), 1 avion de patrouille maritime Atlantique 2 et 1 frégate anti-aérienne. Ses moyens militaires sont notamment déployés à partir de l’implantation militaire française aux Émirats arabes unis (IMFEAU), localisée à Abou Dabi. Les pilotes de Rafales sont chargés d’effectuer des missions de reconnaissance afin de collecter du renseignement militaire (positions ennemies, mobilité) ainsi que des frappes ciblées sur des dépôts d’armement et des combattants djihadistes.
Une longue guerre d’usure se profile à l’horizon…
À l’échelle locale, l’opération Chammal s’inscrit dans la continuité de la démarche française de soutien diplomatique au gouvernement irakien, d’aide humanitaire aux populations du Kurdistan irakien et de renforcement militaire des Peshmergas (notamment avec la livraison de canons de 20mm destinés à frapper les blindés légers de Daech).
À l’échelle régional, l’objectif de l’opération Chammal est de soutenir, par un appui aérien, l’armée irakienne ainsi que les Peshmergas, d’affaiblir Daech en bombardant ses positions et d’empêcher la constitution d’un sanctuaire terroriste djihadiste en Irak qui menacerait directement l’État irakien (la percée de Daech atteignait cet été les alentours de la capitale irakienne, Bagdad) et déstabiliserait l’ensemble de la région moyen-orientale déjà en équilibre précaire (conflit israélo-palestinien, guerre civile syrienne, terrorisme djihadiste, fragilisation des régimes par les printemps arabes, revendications indépendantistes kurdes, tensions confessionnelles notamment entre sunnites et chiites).
À l’échelle mondiale, l’intervention française en Irak constitue un maillon opérationnel dans la chaîne de la stratégie française de lutte globale contre le terrorisme qui comprend également l’opération Barkhane dans la bande sahélo-saharienne. Les géostratèges français articulent ses deux théâtres d’opération distants en menant une guerre moins visible contre les filières terroristes – dont le groupe armé Daech – stratégie qui repose sur un dispositif de cyberdéfense renforcée, de vigilance sécuritaire intérieure augmentée et d’infoguerre notamment dans les médias et sur les réseaux sociaux.
Le renversement du rapport de force entre Daech et l’armée irakienne – appuyée de manière circonstancielle par les Peshmergas et des milices chiites – consiste en la première mission d’une opération de stabilisation et de pacification régionales qui s’inscrit nécessairement dans la longue durée. Or, dans un contexte de coupe budgétaire et de réduction des effectifs militaires (ménageant certes les capacités opérationnelles), la faculté de résistance à l’usure de l’outil militaire français, soumis à une activité longue, soutenue et dans des conditions environnementales difficiles, constitue une épineuse question au cœur du débat militaire français.
thank you very nice website article