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La présence militaire française au Tchad critiquée : Idriss Deby fait monter les enchères

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Mercredi, alors que le Tchad fêtait le cinquantenaire de son indépendance, acquise le 11 août 1960, le président tchadien Idriss Deby a remis en cause les opérations militaires de la France dans son pays, et notamment l’opération Epervier. Cette dernière date en effet de 1986, lorsque la Libye avait envahi le Nord du Tchad, ce qui ampute sa légitimité aux yeux du pouvoir tchadien. En conséquence, le président tchadien souhaite une contrepartie financière à la présence de l’armée française qui utilise actuellement gratuitement l’espace aérien du Tchad et des zones d’entrainement au sol.

Cependant, le Tchad ne demande pas le retrait de la France de son territoire. Cette annonce, faite cinquante après l’indépendance du pays, vise en réalité à réaffirmer la souveraineté du pouvoir tchadien sur son propre territoire. En janvier dernier, le Tchad avait déjà été à l’origine de la décision de l’ONU de mettre fin à la Mission des Nations Unies du Tchad et de la Centrafrique (MINURCAT) qui avait été créée en 2007, et ce d’ici le 31 décembre 2010. Cette mission, dont l’objectif était de faire face à l’augmentation de la violence et à l’afflux de réfugiés soudanais, était considérée comme un échec selon le Tchad, qui avait par ailleurs été réticent à sa création il y a deux ans.

Face à cette demande de « révision » de l’accord en place, la France a répondu qu’elle était prête à réexaminer les modalités de sa présence militaire au Tchad, pays qui se trouve au cœur de l’Afrique sahélienne et dont la position est clairement stratégique. Cela va de pair avec les déclarations du Ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, qui avait signalé que la France renforcerait ses positions en Afrique suite à la mort de Michel Germaneau, acte revendiqué par Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI). Mais cette approbation française, qui intervient comme si de rien n’était, n’est-elle pas le signe de la posture défensive de la France dans cette affaire ?

En février dernier, Hervé Morin se rendait au Sénégal pour trouver un accord afin de fermer les bases militaires françaises dans ce pays. Ce retrait a été symbolisé le 9 juin par une cérémonie symbolique. Ainsi, la diplomatique française en Afrique semble là-encore en prendre un sérieux coup. Sa présence est partout de plus en plus remise en cause et conditionnée à toujours plus d’avantages pour le pays hôte. L’influence française en Afrique risque, de fait, de se réduire inlassablement. Et ceci intervient alors que la France, face à un déficit inquiétant, cherche par tous les moyens à faire des économies.

Cette annonce peut certes redorer le blason d’Idriss Deby, mais après vingt au pouvoir, pourquoi attendre aussi longtemps pour montrer son hostilité à la présence militaire de l’ex-puissance coloniale ? Si le président tchadien s’affiche comme le pourfendeur du néo-colonialisme, c’est surtout à cause de l’appât du gain : après les gains liés à l’exploitation du pétrole dans le pays, c’est une nouvelle rente qui viendra désormais alimenter les caisses de l’Etat tchadien.

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