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Syrie : l’option turque

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Après les massacres d’Houla, les Nations Unies et dix pays occidentaux (dont la France) ont expulsé les diplomates syriens présents sur leur territoire.

La futilité de cette réaction est impressionnante. D’abord, car elle est inutile : cet acte diplomatique n’a de portée que pour les Etats respectueux du droit en général et du droit international en particulier. Il y a fort à parier que ce n’est pas le retour de ses diplomates qui empêche M. Assad de dormir. Ensuite, car elle est ridicule par rapport aux massacres commis à Houla : hommes, femmes, enfants, massacrés non pas par des tirs d’artillerie, mais froidement, parfois à l’arme blanche, par les troupes fidèles au régime.

Pour autant, dans la foulée de cette décision, le tabou de l’intervention militaire a été brisé. Elle est maintenant officiellement envisagée. Mais les entraves à une action des armées occidentales sont telles que cette hypothèse reste fort peu probable : nécessité d’un mandat ONU (et donc accord de la Chine et de la Russie), manque de moyens, instabilité de la région et très forte incertitude quant à l’avenir du pays. Chat échaudé craint l’eau froide : aucune puissance occidentale ne veut être accusée d’avoir, par son action, encouragé l’extrémisme et l’instabilité.

Reste la piste turque : depuis plusieurs mois, Ankara jette des jalons (comme les accusations répétées de violations de sa frontière), vilipende avec force le gouvernement Assad, regrette l’inertie de l’ONU… Comme si la Turquie préparait l’opinion mondiale à l’idée d’une intervention de son armée.

Une telle intervention placerait d’un coup la Turquie au rang de grande puissance, capable de rétablir l’ordre et le droit international au nom de l’ONU. Cela « collerait » avec ses ambitions de leader régional, ambitions renforcées par les révolutions arabes qui semblent vouloir ériger le pays en modèle du fait de sa capacité à réunir puissance économique, démocratie et islam. Enfin, l’armée turque, de par son importance, de par sa proximité géographique et de par l’aide qui ne manquerait pas d’être apportée par les occidentaux, aurait les moyens de chasser M. Assad.

Si l’option turque ne reste qu’une possibilité, une chose est certaine : Assad tombera. Son escalade dans la violence et la barbarie ne doit pas masquer le fait que, chaque jour un peu plus, il perd pied. Son pays lui échappe. Il ne pourra plus jamais gouverner « normalement » après ce qu’il a fait. Par ailleurs, Chine et Russie s’éloignent de lui, lentement, mais surement, et ce pour deux raisons. D’abord car il devient difficile pour Moscou et Pékin de soutenir Assad à bout de bras, alors que les images de ses massacres sont largement diffusées dans le monde (et, chose nouvelle, certifiées par les observateurs de l’ONU). Ensuite et surtout, car ces deux alliés traditionnels comprennent que le gouvernement actuel est condamné, qu’il ne contrôle plus rien, et donc qu’il ne représente plus aucun intérêt pour eux.

Mais si la chute d’Assad est inéluctable, cela peut prendre du temps. Et chaque jour qui passe apporte des dizaines de morts supplémentaires.

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