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Ce que la présidence de M.Eltsine (1991-1999) nous dit de la Russie d’aujourd’hui

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File photo of Russian President Yeltsin gesturing as he speaks in Moscow

Après l’arrivée au pouvoir de Boris Eltsine, et la dissolution de l’URSS en décembre 1991, dans un contexte de chute du bloc communiste, l’heure est à la libéralisation. Si la transition vers un régime démocratique est limitée (l’Etat conserve des moyens d’interdire l’opposition, de la disqualifier d’élections, et la liberté d’opinion et de presse est restreinte), elle s’accompagne en revanche d’une libéralisation économique rapide.

Libéralisation de l’économie

Prenant acte de l’obsolescence des moyens de production du pays et de la rigidité de l’économie, le nouveau pouvoir russe décide de privatiser de nombreuses entreprises publiques, et de libéraliser les prix.

La libéralisation rapide des prix s’accompagne d’une inflation galopante : elle dépasse les 2000% en 1992. Ainsi, le pouvoir d’achat des ménages, dont le salaire n’a pas suivi la hausse des prix, s’effondre brusquement. En 1995, un tiers des russes vit sous le seuil de pauvreté, et un tiers supplémentaire consacre 90% de son revenu aux dépenses de première nécessité.

Par conséquent, la majorité des russes n’a d’autre choix que de céder ses parts d’entreprises pour survivre, au profit de privilégiés qui se constituent rapidement une fortune colossale et mettent, aux côtés des capitaux étrangers, la main sur l’économie du pays. Ces nouveaux oligarques opèrent alors une réorganisation rapide de l’appareil productif, qui passe souvent par la fermeture d’usines et par des licenciements, ce qui contribue encore à renforcer les inégalités, qui explosent dans le pays.

Retrait de l’Etat et corruption massive

La libéralisation des prix, accompagnée de la privatisation de l’outil de production, a ainsi pour conséquence une chute de 50% du PIB entre 1991 et 1998. Dans ce contexte difficile, l’Etat se voit contraint de réduire drastiquement ses subventions : les retraites sont amputées et la plupart des pensions diminuent, d’autant que nombre de services publics deviennent payants, comme les transports, mais aussi la santé. C’est pourquoi de nombreux russes, qui bénéficiaient de la gratuité du service public de santé, n’ont plus les moyens de se soigner.

Le retrait de l’Etat se matérialise aussi par la hausse de l’économie informelle et la mainmise de la mafia sur la société, qui gangrène tous les secteurs du pays. De nombreux arsenaux militaires sont pillés avec la complicité de fonctionnaires corrompus.

Crise sociale et diminution du niveau de vie

Le résultat de la transition économique s’avère dramatique : la chute vertigineuse du niveau de vie des russes, dont le revenu moyen en 1998 atteint seulement 60% du revenu moyen de 1991, et le retrait de l’Etat de secteurs comme celui de la santé, ont pour conséquence une surmortalité que certains chercheurs ont estimé à plusieurs millions de personnes (!) sur la décennie, et une diminution de l’espérance de vie de six ans. D’autant que cette surmortalité s’accompagne alors d’une chute importante de la natalité. C’est pourquoi, malgré un solde migratoire positif sur la période, la population russe passe en dix ans de 149 à 146 millions d’habitants.

Or, cette situation difficile pour le pays, qui trouve son paroxysme dans la crise bancaire et financière de 1998 dans laquelle de nombreux russes perdent toutes leurs économies, permet en grande partie d’expliquer la popularité de M. Poutine aujourd’hui, dont l’action s’est articulée autour de l’idée du retour de la stabilité économique et d’une Russie forte à l’international.

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