Pays industrialisés

Les conséquences économiques de la réunification allemande

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Mon Dieu, aide-moi à survivre à cet amour mortel, oeuvre réalisée par Dmitri Vrubel pour les 20 ans de la chute du Mur, et inspirée de la photographie prise par Régis Bossu de Brejnev et Honecker en 1979

« Ich bin ein Berliner » avait crié J.F.Kennedy en 1963, pour soutenir Berlin Ouest alors enclavée depuis le début de la construction du Mur en 1961. Aujourd’hui, la jeunesse européenne pourrait aisément reprendre la formule, puisqu’elle afflue pour profiter de la douceur de vivre berlinoise. Après 20 ans de travaux titanesques, la ville est devenue le symbole d’une Allemagne réunifiée. Mais au delà du cas berlinois, si l’on se replace dans une perspective de long terme, comment analyser les conséquences économiques de la réunification pour l’Allemagne et l’Europe ?

Le 9 novembre 1989, les Berlinois renversent le Mur. Un an plus tard RFA et RDA sont réunifiées. Le retour d’une Allemagne unie est un bouleversement majeur dans la géopolitique européenne, l’équilibre des puissances est alors grandement modifié. Pour éviter le retour d’une Allemagne hégémonique, F.Mitterrand négocie la création d’une zone monétaire unique comme condition de la réunification. L’objectif étant d’arrimer définitivement l’Allemagne à l’Europe et de reprendre la main sur la politique monétaire européenne, le Franc étant à l’époque affaibli par rapport au Deutsche Mark.

La réunification définitivement signée en octobre 1990, commence alors l’immense tâche non encore achevée de la « mise à niveau » de l’ancienne RDA. Le coût de la réunification estimé à 1500 milliards d’euros explique en partie pourquoi l’Allemagne est aujourd’hui réticente à aider les pays du sud de l’Europe. Cependant, c’est l’Europe entière via le jeu des monnaies qui a subi l’ajustement allemand. Les fortes dépenses qui suivirent la réunification ont provoqué une forte inflation (5,1% en 1992), la Bundesbank a alors décidé unilatéralement de remonter son taux directeur à 9,5% pour freiner l’inflation. Or, la stabilité des taux de change faisant partie des conditions requises pour la création de l’euro, les Européens n’eurent d’autre choix que de faire de même. La remontée des taux entraîne une asphyxie de la croissance, et une augmentation du chômage (10% en 1993). La réunification suivie de la politique monétaire non coopérative allemande expliquent en partie la stagnation économique européenne du milieu des années 1990.

Ajoutons que l’Allemagne de l’Est, est devenue un atout pour l’industrie allemande. Les entreprises de l’Ouest ont pu après avoir acheté leurs consœurs de l’Est profiter des liens que celles-ci avaient tissés avec les pays d’Europe de l’Est, car leur implantation y a été facilitée. L’Allemagne s’est alors constituée un véritable Hinterland, à la fois débouché à l’export et zone de production pour les pièces détachées ensuite assemblées en Allemagne. L’industrie allemande a ainsi accru sa compétitivité-coût. Les succès de l’économie allemande ne sont donc pas étrangers à réunification du pays.

La réunification de l’Allemagne de l’Est a donc pesé lourd dans le destin de l’Europe, la création de la zone euro en est une illustration.

Pour aller plus loin : Guillaume Duval, Made in Germany, le modèle allemand au-delà des mythes.

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