Victoire écrasante d’Erdogan en Turquie : la nouvelle Constitution en marche ?
Les élections turques d’hier ont couronné le triomphe du Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan. Le parti d’Erdogan s’assure ainsi, avec 49,9% des suffrages (soit son meilleur résultat), une troisième législature consécutive.
Dès lundi, nombreux sont ceux qui ont salué cette victoire, notamment en Europe. Herman Van Rompuy, président de l’UE, et José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, ont ainsi félicité abondamment le Premier ministre turc, appelant dans un communiqué commun au « renforcement des institutions démocratiques » et à la « modernisation du pays ». Il est pourtant à signaler que les problématiques européennes ont été très occultées durant la campagne électorale, beaucoup d’électeurs n’espérant plus grand chose de Bruxelles. Ainsi, l’Europe n’est plus au cœur des priorités turques (mais l’a-t-elle jamais été ?), et c’est aujourd’hui le projet de nouvelle Constitution qui est au cœur de la vie politique turque.
Pourtant, cette victoire électorale n’est pas totale pour l’AKP qui n’obtient pas la majorité des deux tiers, majorité nécessaire pour pouvoir modifier la Constitution sans avoir à négocier avec les partis d’opposition. L’AKP ne possède en effet que 326 sièges au Parlement et n’a pas atteint le chiffre fatidique des 330 sièges. M. Erdogan a ainsi déclaré que « la nouvelle Constitution doit se faire par le compromis, la consultation et la négociation » selon les vœux du peuple, ajoutant que son parti et lui iraient « vers l’opposition » en vue de négocier. Mais déjà, les projets de refonte de la Constitution d’Erdogan sont critiqués de toute part, certains craignant qu’il ne crée un système politique à la tête duquel il pourrait se hisser et mettre à exécution des prétendues ambitions autocratiques. Si le Parti républicain du peuple CHP (centre gauche) est arrivé en seconde position, l’AKP pourrait devoir discuter essentiellement avec le parti pro kurde BDP en vue d’un accord, bien que celui-ci puisse poser ses conditions et demander un statut d’autonomie pour le peuple kurde (représentant 12 à 15 millions d’habitants en Turquie).
Mais aujourd’hui, il semble bien que la Constitution turque, issue du putsch militaire de 1980, ait besoin d’une cure de jouvence. Sans cela, la Turquie pourra-t-elle entrer pleinement dans le XXI° siècle et… dans l’Union Européenne un jour ?