L’Etat Islamique en Irak et au Levant (EIIL) : le jihad qui plonge l’Irak dans le chaos
Nous avons assisté la semaine dernière à une impressionnante offensive d’EIIL en Irak. Cette organisation est devenue redoutablement puissante, en devenant maîtresse d’une importante partie de l’Irak, débordant même un peu sur la Syrie. Le gouvernement irakien de Nouri Al-Maliki a lancé ce week-end une importante contre-offensive pour reprendre l’initiative face aux jihadistes.
L’EIIL est une émanation de la branche irakienne de Al-Qaeda, puis est devenu de plus en plus autonome, voire aujourd’hui s’oppose radicalement en terme de projets avec la maison mère. Alors qu’Al-Qaeda incarne un jihad mondialisé et déterritorialisé, l’EIIL propose un jihad ancré dans un territoire précis ayant vocation à mettre en place un Etat islamique.
La semaine dernière, le groupe a mené une importante campagne militaire, débouchant sur d’importants succès. L’organisation jihadiste de Abou Bakr Al-Baghdadi (chef de l’EIIL depuis 2009) s’est emparée de la province de Ninive, et de la ville de Mossoul, 2ème plus grande ville du pays. L’EIIL en a profité notamment pour piller les banques de la ville : le groupe se serait emparé de l’équivalent de 500 milliards de dinards irakiens. Cette somme équivalente à près de 330 millions d’euros en fait le groupe terroriste le plus riche de la planète jihadiste.
Désormais, l’EIIL est devenu le principal parti sunnite de l’Irak, réussissant à « jihadiser » les populations comme les talibans en zone pachtoune en Afghanistan et Pakistan (bien qu’il y ait d’importants mouvements de réfugiés dus à la réputation de ce groupe très violent).
La réussite de ce groupe est en partie le produit de l’échec de l’Etat irakien. Le premier ministre irakien depuis 2006 Nouri Al-Maliki n’a jamais réussi à diriger et à unifier la politique d’un Etat marqué par la fracture religieuse entre sunnites et chiites. Pour beaucoup d’observateurs, le pouvoir central n’a jamais su élargir l’assise du pouvoir aux sunnites et incarne de plus en plus un pouvoir confessionnel chiite agressifs.
Le pays plonge donc de plus en plus dans le chaos, et le spectre de la dislocation s’approche. En effet, les kurdes tirent parti de la paralysie du gouvernement central, avançant leurs pions de manière habile avec les deux camps, et récupèrent des territoires qu’ils estiment leurs.
L’échec de la réconciliation nationale suite à l’ère Hussein, l’insécurité qui règne, le vide politique forment ainsi un terreau fertile pour l’expansion d’un groupe comme EIIL.
Quid des interventions extérieures
Si les forces de sécurité nationale s’alliant avec les tribus semblent avoir relevé la tête dans les combats durant le week-end, le gouvernement irakien aura bien du mal à se tirer seul de cette situation.
Les Etats-Unis, conscients du danger de ce « Sunnistan » qui émerge, ont décidé samedi d’envoyer un porte-avion dans le Golfe Persique, mais restent opposés à l’idée d’envoyer des hommes au sol.
L’Iran estime pour sa part que toute intervention étrangère serait néfaste. Le gouvernement d’Hassan Rohani s’est toutefois déclaré prêt à aider le gouvernement irakien, et n’a pas exclu une coopération avec les américains pour lutter contre le terrorisme d’EIIL.