Les leçons de la crise des missiles de 1962
Ce mois d’octobre 2012 marque le 50e anniversaire de l’apogée des tensions américano-soviétiques. Souvent l’objet de réductions simplistes ou de théories fumeuses, cette « crise de Cuba » ou « crise des fusées », sous-estimée à l’époque, a néanmoins été un point déterminant dans la conception contemporaine de l’utilisation de l’arme nucléaire.
A l’origine, un simple repérage aérien de l’armée américaine au-dessus d’une île dirigée par un putschiste cherchant l’appui d’une grande force étrangère. Ce qui aurait pu être le scénario d’un nanar de série B a constitué la preuve irréfutable de ce qu’on a appelé l’équilibre de la terreur : des fusées nucléaires pointées sur les Etats-Unis, dont le lancement n’aurait jamais pu avoir lieu, sauf circonstances extrêmes. Un épisode qui restera gravé dans l’histoire américaine, les Etats-Unis faisant payer depuis lors au régime castriste son erreur de l’époque. Un fait qui a montré l’inexpérience de deux chefs d’Etat, l’un (Khrouchtchev) étant déjà proche de la sortie, l’autre (Kennedy) activant le seuil d’alerte militaire DEFCON 2, seuil jamais atteint auparavant… ni même après le 11 septembre !
En réalité, cette crise a été la démonstration du concept de « dissuasion nucléaire », celui-là même qui est agité par toute puissance cherchant à acquérir l’arme à des fins militaires. Mais elle a également montré que dans les relations internationales, la chance a toute sa place. Les décideurs politiques des trois bords, fussent-ils aussi brillants et rationnels que possible, n’ont jamais eu accès à suffisamment d’informations pour être absolument persuadés qu’ils prenaient bien la décision adéquate. Elle a enfin montré que la décision soviétique de s’implanter à Cuba, fût-elle kamikaze, a obligé Kennedy à retirer les missiles américains Jupiter implantés en Italie et en Turquie. Un gain substantiel alors même que l’URSS payait jour après jour les conséquences de la chute du Mur de Berlin un peu plus au nord.
Un seul perdant dans cette histoire, Cuba
Alors oui, que serait-il advenu si le capitaine Arkhipov avait répliqué à l’attaque de son sous-marin nucléaire par la flotte américaine ? Qu’auraient fait les Russes en cas d’invasion de Cuba ? Tant de scénarios qui auraient pu bouleverser à jamais l’opposition américano-soviétique. Tant d’hypothèses qui ont traversé l’esprit de millions de personnes insatisfaites par la réalité des faits. Car un seul constat demeure : le castrisme règne toujours en maître sur Cuba, et ce alors même que les rumeurs les plus folles circulent toujours à propos de la santé du Lider Maximo. Une île qui n’avait d’autre choix à l’époque que de se rapprocher des Soviétiques pour contrebalancer les menaces américaines. Un choix dont l’île paie encore le lourd tribut aujourd’hui (même si, bien évidemment, l’embargo dont elle est victime ne peut expliquer seul les difficultés cubaines). Et qui, cinquante ans plus tard, a pour l’instant évité au monde un nouveau désastre nucléaire…