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Thaïlande : ancienne ou nouvelle crise ?

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Les manifestations qui secouent le pays depuis le mois de novembre rappellent à plusieurs égards celles de 2008 et de 2010.  La contestation actuelle fait suite au dépôt d’un projet de loi d’amnistie qui ouvrirait  selon l’opposition, la possibilité d’un retour de Thaksin Shinawatra actuellement en exil à Dubaï afin d’échapper à une condamnation à la prison pour malversations financières. Menée par une alliance rassemblant des partisans de la monarchie  et des membres du principal parti d’opposition, le Parti du peuple, les « jaunes » conteste plus largement  la politique de la première ministre, Yingluck Shinawatra, sœur de l’ancien dirigeant. Ils lui reprochent de n’être que l’exécutrice d’ordres dictés par son  frère. Malgré l’abandon du projet de loi, les manifestations continuent. La crise née du coup d’Etat qui a renversé Thaksin en 2006 ne parait ainsi pas complètement achevée, comme en laissait augurer l’élection de sa sœur à la tête de l’Etat. Thaksin continue de cristalliser les tensions. Ainsi, face aux « jaunes » qui refusent le « système Thaksin », les « rouges », des paysans souvent très pauvres, soutiennent le gouvernement et Thaksin. Considéré comme corrompu et populiste par l’opposition, il a su s’imposer comme une véritable figure de pouvoir et de progrès auprès des masses rurales.

Cette crise politique a franchi un nouveau seuil avec la démission de l’ensemble des députés du principal parti d’opposition dimanche 8 décembre. Face à cela, la première ministre Yingluck Shinawatra, a renouvelé sa proposition d’élections anticipées en février après avoir dissout le Parlement. Sa stratégie vise à rappeler sa légitimité démocratique : elle n’acceptera le départ du pouvoir que s’il est appuyé par un vote et non une contestation et des pressions de l’opposition. Cette politique de main tendue vers l’opposition participe de cette stratégie ouverture et est à même de décrédibiliser l’opposition qui peine à proposer des alternatives.

L’éternel mythe des deux Thaïlande ?  

Si la principale figure de l’opposition, Suthep Thaugsuban, ancien chef du Parti démocrate, a appelé au rassemblement derrière lui, son manque de vision politique à long terme et les craintes de l’opposition de voir la crise perdurer et affecter les performances économiques du pays en relativise la portée. Au-delà de la contestation du pouvoir, la situation économique contrastée du pays constituera un enjeu des prochaines élections.Derrière le soutien populaire se cache une crise sociale. Nombres d’habitants des provinces du nord du pays estiment être passés à côté du développement. Le gouvernement alloue ainsi 70% de son budget à la capitale et sa région tandis que le nord-est du pays qui regroupe un tiers de la population n’en reçoit que 6%. Cette crise, et les positions prises par les deux camps révèlent par ailleurs une conception particulière de l’exercice du pouvoir. Ce sont là les valeurs du pays et leur évolution qui sont interrogées. La proposition de Suthep Thaugsuban de mettre en place un Conseil populaire non élu, du fait de l’importance de la population rurale qui porte régulièrement au pouvoir le Phue Thai, illustre bien la déconnexion politique et idéologique au-delà des disparités économiques. Enfin, la succession à venir du roi Bhumibol Adulyadej , et la possibilité qu’elle soit assurée par son fils, plus acquis à la cause Thaksin que son père, risque de renforcer la contestation si une issue n’est pas trouvée d’ici là.

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