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Japon : première abdication d’un empereur depuis deux siècles

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Longtemps évoquée, l’abdication de l’empereur Akihito a finalement été fixée au 30 avril 2019.

Abdication empereur Japon

Le statut divino-humain de l’empereur

Les notions de religion et politique s’entremêlent au sein de la société japonaise, et s’incarnent en la personne de l’empereur.  Ce dernier est le chef de l’Etat, et le symbole étatique du Japon, bien qu’aujourd’hui sa fonction ne soit que symbolique. L’empereur actuel, Akihito, est le dernier d’une succession que la tradition prétend ininterrompue et que la légende historique fait commencer en 660 av. J.C. avec l’empereur Jimmu. L’empereur est d’ascendance divine, issue de la divinité Amaterasu-Ô-Mikami, la « déesse-soleil ». Sous l’ère Meiji (1868-1912), caractérisée par l’ouverture sur l’Occident, le centre de la doctrine est l’empereur divin. Il est au-dessus de l’Etat, du peuple, transcende la nation et le pouvoir car d’essence divine.

La Constitution de 1889 est un don de l’empereur au peuple, dans laquelle l’empereur est le symbole de la nation, le chef suprême, et se place au-dessus du gouvernement. Tout le pouvoir procède de sa personne mais il n’est pas responsable des actes du gouvernement. Le peuple dispose des droits que l’empereur lui a conférés, mais a également des devoirs d’obéissance et de loyauté envers ce même empereur et ses représentants.

Les éléments de la politique et de l’idéologie japonaise jusqu’en 1945, trouvent leurs fondements dans la Constitution de 1889. Même aujourd’hui, bien après les manifestations nationalistes et religieuses de la guerre du Pacifique, l’empereur est toujours au cœur du kokutai, c’est-à-dire au cœur de l’identité nationale.

La volonté d’abdication de l’empereur Akihito

L’empereur Akihito est le 125e empereur du Japon. Monté sur le trône en 1989 après la mort de son père Hirohito, qui régna pendant l’ère Showa (1926-1989), il célébrera ses 84 ans le 23 décembre prochain. Très attaché à la Constitution pacifique de 1947, il s’est engagé en faveur de la réconciliation avec le reste de l’Asie. Le populaire empereur Akihito avait surpris le pays en août 2016 lorsqu’il avait exprimé son désir de se retirer, après un règne de près de trois décennies, invoquant son âge avancé et des problèmes de santé. Cette annonce avait posé problème car aucun texte de loi au Japon ne prévoyait le départ en retraite d’un empereur, la fonction s’exerçant normalement à vie. La question de son abdication est revenue très souvent dans la vie politique japonaise. Son abdication était soutenue par une grande partie de la population japonaise, compréhensive des difficultés à assumer la fonction d’empereur. En juin dernier, le Parlement a adopté une loi autorisant Akihito à abdiquer en raison de son âge, dans les trois ans à compter de la promulgation du texte. Une nouvelle étape était alors franchie vers l’abdication de l’empereur.

Le 1er décembre, le Premier ministre, Shinzo Abe, a indiqué que le règne de l’empereur d’Akihito prendrait finalement fin le 30 avril 2019. Il s’agira de la première abdication d’un empereur japonais depuis plus de deux siècles. Le conservateur M. Abe et ses soutiens, toujours très attachés au culte shinto (plus ancienne religion du Japon dont l’empereur est le garant), étatisé durant les années 1930-1940, étaient opposés à l’abdication.

Le fils aîné de l’empereur, le prince Naruhito, âgé de 57 ans, devrait lui succéder au lendemain de l’abdication. Il deviendra ainsi le 126e empereur japonais. Celui-ci, marié à la princesse Masako, n’a pas eu de fils et seulement une fille, la princesse Aiko, âgée actuellement de 16 ans. L’absence de jeunes héritiers masculins a déjà fait envisager des changements des règles de succession, comme par exemple l’autorisation donnée aux femmes d’accéder au trône. Une possibilité néanmoins rejetée par les plus traditionalistes. La question de la succession de l’empereur n’a pas fini d’être débattue au Japon.

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