Bonne dette, mauvaise dette : comparaison France / Japon
Le lancement des hostilités fut le fait de l’agence de notation Standard & Poor’s, mais le passage à l’acte est bel et bien signé Fitch Ratings : vendredi dernier, l’agence de notation financière a abaissé la perspective de la note de la dette française à long terme, la faisant passer de stable à négative et menaçant même de retirer à la France son triple A si la situation du pays ne s’améliore pas dans les prochains mois. De l’autre coté du globe le Japon explose les records en matière de dette souveraine, mais ne partage pas pour autant le même sort que l’État français : alors comment expliquer une telle différence de traitement?
A quelques mois des élections présidentielles, la France connaît bien des peines à maintenir son triple A alors que dans le même temps, la croissance peine à re décoller dans la zone euro. Ceci explique cela : la crise a signifié l’augmentation des dépenses étatiques parallèlement à la baisse des recettes fiscales pour l’État, entraînant par là l’augmentation du déficit public et par le même biais de la dette publique son corolaire, tandis que de l’autre coté la nécessité de lutter contre une dette publique trop importante contraint les pays à revoir leurs perspectives de croissance à la baisse. Au delà de la règle d’or européenne et des nécessités budgétaires imposées par le traité de Maastricht, ce sont d’ailleurs les agences de notation financière qui les y contraignent : l’abaissement de la note de la dette souveraine d’un pays compromet fortement ses perspectives de croissance à long terme, comme l’a montré un sondage Ifop paru ce matin dans Sud-Ouest Dimanche selon lequel les deux tiers des français se disent pessimistes quant au devenir de l’économie française suite à la détérioration de la note de la dette française vendredi dernier.
Égale à 68,2% du PIB français en 2008, cette dette dépasse à ce jour les 86% de l’indicateur économique. Mais la situation est bien plus grave au Japon : toujours empreint des effets de l’éclatement de la bulle spéculative japonaise dans les années 1990, le Japon connaît à ce jour une dette publique supérieure à 200% du PIB, soit la dette publique la plus importante au monde depuis 2010. Et pourtant, le Japon est loin de connaître le même sort que l’État français :
A l’inverse de la dette publique française, la dette publique japonaise est avant tout détenue par des agents économiques japonais, supposant par là l’annulation de toute logique de dépendance vis-à-vis d’un pays tiers, et donc la moindre inquiétude des agences de notation financière à l’égard de l’évolution de la dette souveraine du Japon à long terme.
A contrario, la dette publique française est avant tout détenue par des agents économiques non-résidents, en majorité non-originaires de l’Union Européenne : si demain ces agents décident de suspendre leurs prêts en direction de la France, c’est l’avenir de l’économie française toute entière qui en sera affecté. Le débat sur la monétisation de la dette est donc relancé.