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Shinzo Abe, le Japon, la relance et le libre-échange

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Shinzo Abe, le nouveau premier ministre japonais, devrait annoncer vendredi son intention d’entrer dans les négociations du TPP (Trans-Pacific Partnership), un vaste (et très controversé) projet d’établissement d’une zone de libre-échange dans l’aire Pacifique (source : l’agence de presse japonaise Kyodo). Cet accord marquerait un tournant remarquable dans la stratégie économique du Japon, pays traditionnellement très protectionniste.

Le TPP tel qu’il est actuellement négocié (sans le Japon donc) réunirait 11 pays : l’Australie, le Pérou, le sultanat de Brunei, le Vietnam, Singapour, la Nouvelle-Zélande, la Malaisie, le Canada, le Mexique, le Chili et, bien entendu, les États-Unis. Un projet ambitieux qui changerait radicalement de visage s’il devait inclure la 3e économie du monde…

Lors de la précédente campagne électorale, M. Abe avait expressément fait part de son désir de rejoindre le TPP, et ce dans le but de relancer les exportations des grands groupes nippons. Un projet qui semble emporter le soutien d’une majorité de japonais, même si certains groupes de pression, comme les agriculteurs, s’opposent farouchement à l’idée d’une entrée en concurrence de la production nationale avec l’étranger.

Il semblerait que l’adhésion au TPP soit le 3e pilier de la stratégie de relance de la croissance mise en œuvre par M. Abe, avec la dévaluation du Yen et l’expansion budgétaire.

Le Japon, que certains analystes voyaient 1ere puissance économique mondiale à la fin des années 80 (cf. le livre d’Ezra Vogel, Japan as Number One, 1979), connaît depuis maintenant deux décennies une irrémédiable stagnation économique : vingt ans de croissance nulle.

Le Japon et son économie font face à quatre défis majeurs : la dette (la plus élevée de l’OCDE, à plus de 200% du PNB), la déflation (qui bloque depuis 20 ans toute reprise de la croissance), le vieillissement de la population et la dépendance énergétique.

La dette est complètement négligée par les gouvernements japonais successifs depuis deux décennies. En effet, cette dernière est presque exclusivement détenue par des japonais (le pays connaît un très fort taux d’épargne), et l’État ne rémunère pour ainsi dire pas ses bons du trésor.

Le vieillissement de la population est un problème majeur pour l’archipel, d’autant plus que le pays est fermé politiquement à l’idée d’un recours à l’immigration : seule solution développée à ce jour, la robotisation.

La dépendance énergétique avait été résolue par le recours massif à l’énergie nucléaire. La fermeture des centrales suite à la catastrophe de Fukushima a rappelé au pays la fragilité de sa situation sur ce plan, la facture énergétique du pays ayant littéralement explosé (grevant ainsi sa compétitivité industrielle). Notons que M. Abe est un fervent partisan de la réouverture des centrales…

Reste la déflation. C’est l’ennemi public N°1 pour M. Abe, car tant qu’il y a déflation, il ne peut y avoir de croissance. Sa stratégie pour relancer l’inflation est somme toute assez basique : dévaluer massivement le Yen (pour l’instant uniquement par des annonces publiques : la sur-réactivité des marchés financiers laisse songeur) et creuser (encore un peu plus) le déficit budgétaire. Rien de nouveau au pays du Soleil Levant…

L’archipel dispose néanmoins de trois atouts maitres : l’extraordinaire résilience des japonais, l’avance technologique considérable du pays sur de nombreux plans et surtout les femmes japonaises, actuellement largement sous-employées (ce qui permet au Japon de conserver un chômage inférieur à 5%). Ce sont elles qui constituent le véritable « réservoir de croissance » du pays.

Pour aller plus loin :

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