L’Iran à nouveau sous pression américaine
Depuis le 7 août dernier, Washington impose de nouvelles sanctions économiques à l’Iran. Un retour aux politiques des années 2000, menées par G.W Bush et largement critiquées aujourd’hui en Europe et en Asie. Continuer ou non à avoir des relations économiques avec Téhéran devient un choix diplomatique, puisque les États-Unis exercent une pression sur les autres nations afin d’être suivi dans leur démarche.
Le retour à une politique anti-iranienne
La stratégie de Donald Trump concernant l’Iran est agressive mais cohérente. Le président américain souhaite conforter ses positions et celle de ses alliés au Moyen-Orient : Israël et l’Arabie saoudite, aujourd’hui mis en difficulté par Téhéran. En sortant de l’accord sur le nucléaire iranien en mai dernier, Donald Trump a décidé de remettre la pression sur l’Iran. Washington reste toutefois ouvert à un nouvel accord, qui engloberait la question nucléaire mais également les activités iraniennes en Syrie, au Yémen, en Palestine (soutien au Hamas) et au Liban (soutien au Hezbollah). Les autorités iraniennes ont déjà décliné cette invitation, affirmant que le seul accord possible est celui du Joint Comprehensive Plan of Action (JCPoA) de 2015.
Le président américain reprend également le discours des années Bush sur la volonté d’un « Regime change » en Iran. Un vocabulaire qui séduit une partie de l’opinion publique occidentale, hostile au régime des mollahs. Cependant, si la contestation monte dans les villes iraniennes, le régime conserve ses nouvelles alliances et ses nouveaux partenaires acquis depuis l’accord de 2015. Ainsi, Téhéran pourra compter sur la Chine, l’Inde, la Russie et peut-être même la Corée du Sud, pour continuer à commercer.
Réactions en Asie et en Europe
La Chine a déjà profité des défections européennes pour récupérer plusieurs contrats. Ainsi, la CNPC (China National Petroleum Corporation) prend la place de Total dans le domaine de l’énergie. Pékin a annoncé vouloir honorer les contrats signés à hauteur de 600 milliards de dollars sur les 25 prochaines années. La Russie, comme la Chine, continuera de faire des affaires avec l’Iran, au moins pour des raisons politiques, par anti-américanisme principalement. Pour ce qui concerne la Russie, le Kremlin a déjà invité l’Iran à rejoindre l’union douanière de l’Union eurasiatique. L’Inde, de son côté, voit en Téhéran un potentiel partenaire stratégique pour contrer la relation Pékin-Islamabad. En 2016 déjà, l’Inde avait signé avec l’Iran et l’Afghanistan un accord sur le développement du port iranien de Chabahar, afin de concurrencer les investissements chinois dans le port pakistanais de Gwadar.
De même, l’Union européenne et ses membres sont aujourd’hui confrontés à un dilemme. Suivre la politique américaine et abandonner une partie de leur souveraineté ou continuer à respecter l’accord, au risque d’être qualifié, outre-Atlantique, comme soutien du régime iranien. La Commission européenne a donné une indication sur la marche qu’elle souhaitait suivre en mai dernier. En effet, elle a activé une loi autorisant les entreprises européennes à ne pas se conformer aux sanctions américaines contre l’Iran. La banque centrale européenne a également mis en place des outils financiers pour faciliter les investissements des entreprises européennes en Iran.
Le détroit d’Ormuz pour faire pression sur Washington ?
De son côté et comme à chaque grande crise diplomatique, le gouvernement iranien brandit la menace d’une fermeture du détroit d’Ormuz. Cette manœuvre, si elle avait lieu, bloquerait une large partie des exportations pétrolières saoudiennes, koweïtiennes et émiraties. Cependant, la fermeture du détroit pourrait aboutir à une escalade militaire dans la région qui ne bénéficierait pas à Téhéran. En effet, si cette situation de blocage arrivait, une riposte de la marine américaine serait possible et mettrait certainement à genou les forces navales iraniennes. Même en l’absence d’une réponse occidentale, le blocage d’Ormuz pénaliserait en premier lieu l’économie iranienne déjà en difficulté, puisque Téhéran verrait ses exportations pétrolières largement diminuer. Enfin, la montée des cours du pétrole qui s’en suivrait serait de nature à froisser plusieurs partenaires de l’Iran et en premier lieu la Chine. Ainsi, la carte diplomatique de la fermeture du détroit d’Ormuz est bien plus utile aux iraniens en tant que menace. Cependant, celle-ci semble semble aujourd’hui inefficace face au président américain Donald Trump, qui s’est donné pour mission de faire plier l’Iran.