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Mali : un bref état des lieux

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L’année 2012 a vu le Mali s’enflammer : coup d’Etat, expansion terroriste, dégradation de la situation sécuritaire, mécontentement populaire… La liste n’est pas exhaustive, et l’on peut, hélas, aujourd’hui, y ajouter d’autres complications. La fin de l’année 2018 se profilant, elle est l’occasion de faire un bref état des lieux de la situation au Mali.

Carte du Mali
Le Mali, un pays déstabilisé au nord et désormais au centre, la cible du terrorisme et le théâtre d’affrontements inter-communautaires

Le Mali : un pays, deux problèmes

Il faut, avant tout, comprendre qu’avant l’éclatement de la crise en 2012, des tensions existaient déjà, produits de l’histoire du pays, autant que de sa géographie.

Le Mali est un territoire, qui, du fait de sa géographie, est naturellement scindé en deux : au nord se trouve la partie désertique, aride. Au sud, coté capitale, se trouvent les terres agricoles. La population malienne s’est donc dispersée sur le territoire en suivant la logique de ce découpage naturel : une population nomade vivant dans le nord du pays ; une population sédentaire se développant dans le sud.

Le gouvernement malien s’est peu à peu détourné des populations du nord du Mali, principalement composées de Touaregs et de Maures. Du fait du découpage territorial de 1960, les populations du nord du Mali furent rattachées aux pays frontaliers, alors que les populations sudistes étaient rattachées à l’Etat malien. Il en résulta une sous-représentation des premières dans le gouvernement central malien. Le désintérêt  de ce dernier pour les populations du nord les conduisit naturellement à se considérer comme autonomes, et à ériger leur propre gouvernement, en opposition à de celui de Bamako. C’est cette même autonomie qui va conduire les Touaregs à réclamer l’indépendance de l’Azawad, zone qu’ils considèrent comme leur appartenant de droit.

En outre, l’influence de mouvements djihadistes comme Al Quaïda au Maghreb (AQMI), qui fait du nord du Mali sa base arrière de combat, soutient les revendications des rebelles du nord.  Sans se contenter de prendre possession du nord du territoire, les djihadistes vont donc également nourrir le terrorisme contre les forces armées dispersées dans le pays.

Le gouvernement malien doit donc dans un premier temps faire face à une crise double : d’un côté, des revendications indépendantistes de la part des Touaregs -divisés en deux groupes : le Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA) et Ansar Dine- et de l’autre, l’expansion de groupes djihadistes, prenant pour cible les forces armées présentes dans le pays, mais provoquant aussi la mort de civils. C’est avec l’objectif de venir en aide au Mali dans la lutte contre le terrorisme qu’ont été déclenchées diverses opérations militaires.

Le soutien apporté aux forces armées maliennes dans la lutte contre le terrorisme régional

La première opération militaire déclenchée par le président Hollande pour soutenir l’armée malienne dans sa lutte contre le terrorisme fut l’opération Serval. Lancée en 2013, elle s’est donnée pour objectif, en coopération avec l’armée malienne, de stopper l’avancée des terroristes et de prévenir leur expansion dans le pays. Parallèlement au déclenchement de l’opération Serval, le Conseil de Sécurité de l’ONU a créé en février 2013 la Mission européenne de formation de l’armée malienne (EUTM Mali), « qui doit apporter un soutien à la formation et la réorganisation des forces armées maliennes » [1].

En 2017, les gouvernements du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad ont mis en place une force destinée à ce que ces pays luttent conjointement contre le terrorisme : la Force Conjointe G5- Sahel. La FCG5-S a reçu notamment le soutien de l’Armée Française, par l’intermédiaire de l’opération Barkhane -lancée en 2014-, et également celui d’autres forces disposées sur la zone concernée comme la Mission Multidimensionnelle Intégrée des Nations-Unies pour la Stabilisation au Mali (MINUSMA), dont le mandat vient d’être prolongé jusqu’en juin 2019. Des coopérations militaires de grande ampleur ont donc été élaborées, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme dans la bande sahélo-saharienne.

Le Mali : situation post-Serval

Les succès remportés au cours des opérations Serval et Barkhane ne doivent pas voiler la réalité : à partir de 2015, les groupes terroristes se redéploient, notamment dans le centre du Mali, à la frontière entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger. L’insécurité grandit fortement dans cette région et le nombre d’attaques visant les Forces armées maliennes, les membres de la force MINUSMA, les membres de la FCG5-S est en forte augmentation par rapport à l’année dernière (133 attaques entre janvier et septembre 2018 contre 78 entre janvier et septembre 2017). De nombreux civils sont également touchés, victimes collatérales des conflits entre milices.

En effet, en plus de l’activisme des groupes terroristes, le Mali est désormais le théâtre d’affrontements inter-communautaires entre populations peules et dogons. En conséquence, des milices armées que le gouvernement demeure incapable de contrôler, se sont constituées et s’affrontent violemment, compromettant les maigres chances d’éviter un conflit ethnique.  Comme le pointe le Secrétaire Général des Nations-Unies, « le tissu social s’effiloche sous l’effet de conflits inter-communautaires aggravés par l’activité des groupes extrémistes violents, ce qui est extrêmement préoccupant[2] ». Ces conflits inter-milices ont considérablement aggravé le niveau d’insécurité du pays.

Depuis 2012, le Mali est donc le théâtre d’une expansion terroriste contre laquelle les forces armées présentes sur le terrain éprouvent des difficultés à lutter. La lutte contre le terrorisme est certes un combat de longue haleine, qui doit être mené sur le long terme. La complexité de la situation (conditions de terrain difficiles, groupes terroristes multiples etc.) rend la tâche encore plus difficile et le manque de moyens de la FCG5-S – dont fait note le Secrétaire Général dans un rapport de novembre 2018[3]– risque de freiner davantage le travail des forces disposées sur place. L’un des défis majeurs qui se pose pour le Mali et ses pays voisins est aussi de lutter contre la régionalisation du terrorisme.

Toutefois le terrorisme n’est pas l’unique problème auquel doit aujourd’hui faire face le président Ibrahim Boubacar Keïta et d’ailleurs, il n’est pas à traiter séparément des autres car il alimente la violence dans tous les autres conflits. En plus de la gestion d’une opposition politique virulente, le gouvernement doit aussi tenter d’enrayer le plus rapidement possible l’escalade de violence entre les différentes communautés, sous peine de voir le pays définitivement rongé par des luttes intestines meurtrières. Enfin, il doit reprendre le contrôle des territoires du nord du Mali – de nouveau occupés par des groupes indépendantistes – tout en tentant de libérer le centre du pays, désormais également une zone en crise.

Il faut espérer que l’Etat se donne rapidement les moyens de recouvrer son autorité avant que la situation ne dégénère de manière irrémédiable. La présence de la coalition internationale est cruciale dans la mission difficile de la lutte contre le terrorisme, mais elle n’a pas pour devoir de gérer les conflits sociaux…

Sources :

Antoine d’Evry. L’opération Serval à l’épreuve du doute : vrais succès, fausses leçons. Focus stratégique, n°59, juillet 2015.

Olivier Hanne. Cartographie sur le Mali (2012-2015). http://www.geoculture.org/pages/afrique/cartographie-sur-le-mali-2012-2016.html

Ministère des Armées 2018 : Dossier de Presse : Opération Barkhane.

Rapport du secrétaire général des Nations-Unies au Conseil de Sécurité. 25 septembre 2018 : La situation au Mali.

Rapport du secrétaire général des Nations-Unies au Conseil de Sécurité. 12 novembre 2018 : Rapport sur la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel.

[1] Ministère des Armées 2018 : Dossier de Presse : Opération Barkhane.

[2] Rapport du secrétaire général des Nations-Unies au Conseil de Sécurité. 25 septembre 2018 : La situation au Mali.

[3] Rapport du secrétaire général des Nations-Unies au Conseil de Sécurité. Novembre 2018 : Rapport sur la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel.

 

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Jeanne-Marie BIOL

Jeanne-Marie Biol est étudiante en master Carrières Administratives à Sciences Po Bordeaux. Elle s'intéresse particulièrement à l'histoire et à la géopolitique du Moyen-Orient et de la Russie ainsi qu'aux questions de défense. Elle est rédactrice pour les Yeux du Monde depuis novembre 2018.

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