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Etats-Unis/Egypte : l’illusion de l’hyperpuissance

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Au sujet du renversement de M. Morsi en Egypte, la Maison Blanche a « tranché » hier : « nous ne dirons pas que c’est un coup d’état, nous ne dirons pas que ça n’est pas un coup d’état, nous ne dirons rien ». Cette phrase, pouvant à première vue assez habilement synthétiser la notion de « langue de bois diplomatique », mérite qu’on s’y arrête.

Cette déclaration survient dans le contexte du questionnement sur la légalité de l’aide américaine à l’Egypte (1,5 milliards de dollars) du fait de la discutable légitimité du gouvernement mis en place par l’armée.

Au-delà de l’argutie juridique, l’argument américain est simple : coup d’état ou non, il n’est pas dans l’intérêt des Etats-Unis de suspendre l’aide.

En effet, continuer à verser ces dollars revient à conserver le pouvoir d’influence qu’a Washington sur ce pays clé du Moyen-Orient. La première chose que redoute la Maison Blanche, c’est un accroissement de l’instabilité en Egypte : cela ferait porter un risque énorme sur Israël (la dégradation des relations entre Tel Aviv et le Caire pouvant mettre fin au statu quo armé qui prévaut actuellement), et d’un plus large point de vue sur l’ensemble des intérêts américains dans la région.

Ceci étant dit, la réalité du pouvoir d’influence apporté par cette aide est sujet à caution.

Observons la situation. Quand Moubarak (« pilier » de la paix avec Israël et grand ami du Pentagone) a été destitué, Washington a continué à verser l’aide. Aujourd’hui, alors que la Maison Blanche semblait avoir trouvé un terrain d’entente avec le « modéré » Morsi et que ce dernier a eu à subir un coup d’état, Washington continue à verser l’aide…

La réalité est que les Etats-Unis n’ont pas d’autre choix : l’aide, par son importance, est un élément déterminant de la stabilité égyptienne (d’autant plus dans une période de graves difficultés économiques pour l’Egypte). Or, pour les raisons évoquées plus haut, Obama ne peut tout simplement pas se permettre de déstabiliser ce pays ! Washington a donc dû s’accommoder du départ de Moubarak, des relations plus que troubles entre Morsi et le Hamas, du potentiel retour au pouvoir d’une armée qui n’a pas oublié le lâchage de Moubarak… Car il est plus facile d’avaler ces couleuvres que d’assumer les conséquences d’un arrêt de l’aide. Elle continuera   car dans l’état actuel des choses, personne ne gagnerait quoi que ce soit à ce qu’elle s’arrête.

Néanmoins, la menace américaine de « couper le robinet » n’est pas que fictive, elle empêche tout gouvernement égyptien raisonnable de franchir la ligne rouge : Israël.

Mais est-il sérieux de penser qu’un gouvernement prêt à ré-ouvrir les hostilités avec Tel Aviv, ou a minima à entretenir une stratégie de tension avec l’Etat hébreux, puisse être raisonnable ? Pour un gouvernement qui accepterait les conséquences d’un retour à la guerre, la question de l’aide américaine serait un détail.

L’aide, toujours présentée comme un puissant outil de coercition (ce qui est très souvent vrai), apparaît donc dans ce cas précis géopolitiquement parlant inutile (ou presque).

Il n’y a pas de règle ni de loi en géopolitique, uniquement des contingences et des circonstances.

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