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Les villes indiennes se mettent au vert

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Polluées, congestionnées, mal voire non planifiées : les villes fonctionnent encore comme un repoussoir dans le contexte indien. Pour répondre à ces accusations, le gouvernement indien a officiellement annoncé, en juin 2014, le programme «Smart City Scheme». Se présentant sous la forme d’un concours, le programme met en compétition une centaine de municipalités sélectionnées par le gouvernement central. Celles ayant formulé les meilleures propositions en termes d’amélioration des conditions de vie dans la ville se voient octroyer des financements. Pour quels enjeux?

Le 28 janvier 2016, le Ministère du développement urbain indien a annoncé les 20 premières villes sélectionnées.
Le 28 janvier 2016, le Ministère du développement urbain indien a annoncé les 20 premières villes sélectionnées.

Encore essentiellement peuplée de ruraux, l’Inde n’en connait pas moins d’importantes dynamiques urbaines. Selon le WorldFactbook, 32,7% des indiens vivent dans des aires urbaines. Cette part devrait atteindre les 40% d’ici 2030. Dans des villes fortement marquées par le manque d’accès aux services de base et le secteur informel, le gouvernement indien a décidé d’avancer le concept de «smart city» pour répondre aux défis de l’urbanisation. Bien que ne faisant pas l’objet de définition internationale, on associe généralement trois dimensions à la «smart city» ou ville intelligente : la durabilité, l’intelligence (ou efficacité) et la qualité de vie. Concrètement, les villes intelligentes font la part belle aux nouvelles technologies et aux solutions innovantes pour améliorer les conditions de vie des citadins en termes de gestion de l’énergie, des ressources, des déchets, etc… Dans le contexte indien, l’efficacité des services, la connectivité et l’implication des citadins (gouvernance) occupent une place de choix parmi les critères de sélection.

Les smart cities au service de la croissance indienne

S’il répond bien évidemment à des exigences environnementales, le programme «Smart City Scheme», piloté depuis Delhi, repose surtout sur des intérêts économiques bien compris. En effet, les 32% d’urbains produisent actuellement 63% du PIB national et cette part devrait passer à 75% en 2030. Le projet s’inscrit donc dans une stratégie économique globale. La localisation des 100 villes présélectionnées par le gouvernement indien en témoigne. Ainsi, la plupart des municipalités en compétition sont implantées le long de corridors de développement en pleine expansion, à l’instar du Delhi-Mumbai Industrial Corridor (DMIC). Dans ce dernier cas, le rôle attribué aux futures «smart cities» est alors double : assurer un développement urbain sain et contribuer à faire du DMIC un hub industriel et commercial mondial. La connectivité comme critère de sélection central n’est pas anodin non plus. L’Inde constitue ainsi le deuxième plus vaste marché mondial de télécommunications avec près d’un milliard d’utilisateurs. Le gouvernement indien prévoit également que l’industrie de l’IoT (internet des objets) atteigne 15 milliards de dollars en 2020. Potentiellement lucratif, le marché des smart cities implique également un investissement initial élevé. Le gouvernement s’est engagé à financer à hauteur de 14 milliards de dollars sur 5 ans le projet. Pour le reste, les Etats, les municipalités et surtout le secteur privé sont amenés à participer. À cet égard, Delhi a déjà activé sa diplomatie économique. Quelque peu occultée par la vente des rafales, la récente visite de François Hollande en Inde portait également sur la signature de contrat dans le domaine des villes intelligentes. La France venait ainsi compléter la liste déjà bien fournie des pays investis dans ce chantier, aux côtés des Etats-Unis, du Japon, de l’Allemagne ou encore de la Chine.

S’il est encore trop tôt pour juger de la réussite du projet, des critiques ont d’ores et déjà été formulées à l’encontre du processus de présélection des 100 villes. Celui-ci tendrait à conforter des hubs déjà bien développés (situés sur le fameux «quadrilatère d’or») et souvent en situation littorale au détriment de l’hinterland. Bien que s’inscrivant dans la continuité du programme «Housing for all», le caractère inclusif du programme pour les populations les plus pauvres n’est pas tranché. Avec ce projet, l’Inde conforte en tout cas une forme de «modèle» de développement reposant sur une économie tournée vers le marché intérieur (la consommation des ménages compte pour plus de 65% du PIB, à titre de comparaison ce chiffre est de 31% en Chine) ainsi que sur d’importants investissements.

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