L’Espagne cède la présidence d’une UE plus forte à l’extérieur, mais à l’intérieur ?
La gestion de la crise de l’euro s’est faite selon l’axe classique Paris-Berlin mais aussi avec l’aide du pays ayant la présidence tournante de l’Union : L’Espagne. Et la tâche de cette dernière était colossale, d’autant plus que le pays est l’un des plus durement touché par la crise économique. Quels sont ses grandes réalisations au moment de passer la main à la Belgique ?
Un déficit de 11% du PIB, un taux de chômage à 20%, une note qui se dégrade sur les marchés de AAA à AA+… L’Espagne aura tout subit durant sa présidence de l’Union même si sa dette reste inférieure à 55% du PIB. Une maigre consolation pour le pays qui a basé sa réussite économique sur l’immobilier, une valeur qui s’est effondrée durant la crise, emportant avec elle le reste de la croissance du pays. Dans ces conditions l’Espagne a chapeauté la transformation de la BCE en banque d’emprunt et de sauvetage des autres membres de l’Union, empruntant pour eux à des taux abordables. Bien-sûr, de telles mesures exigent une convergence des économies et la mise en place d’une politique économique commune, voire d’un gouvernement économique européen.
Sur le plan extérieur, l’Espagne a suivit le traité de Lisbonne en mettant en place le service Européen pour l’Action Extérieure (SEAE). Ce service devrait théoriquement unifier les positions diplomatiques des Etats membres, du Conseil et de la Commission qui tendaient à guerroyer chacun de leur côté. Le tout pour enfin donner une politique de l’Union lisible à l’extérieur. La présidence espagnole a annulé ou reporté des sommets vides de sens comme celui avec les Etats-Unis (prévu fin mai) et les pays de la Méditerranée (prévu le 7 juin, il est repoussé en novembre), l’UE remarquant enfin que la vraie politique étrangère se déroulait hors des sommets, comme sont venus le rappeler le Brésil et la Turquie avec leur décision insolite d’abord de mener leurs propres négociations avec l’Iran, ensuite de voter non aux sanctions contre ce pays.
A l’intérieur, l’Espagne a dû, comme toutes les présidences tournantes, composer avec les intérêts de chacun. Notamment au sujet des critères de sanction pour les pays ne respectant pas les objectifs fixés dans l’agenda 2020 pour l’emploi et la croissance. Elle lègue son fardeau à une Belgique de plus en plus affaiblie qui est pourtant chargée d’approfondir le SEAE, de continuer le projet de réglementation économique européen, de poursuivre le programme de Stockholm… bref de continuer en toute discrétion ce que ses prédécesseurs ont proposé et de terminer le cycle des présidences tournantes. Ironie de l’histoire : le pays qui terminera ce cycle s’effondrera-t-il avec lui ?