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Quand la Russie exploite les faiblesses de l’Europe

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La nouvelle est tombée aujourd’hui : le parlement chypriote a rejeté le plan de sauvetage proposé par l’Europe. Le pays est donc bloqué, et les banques de l’ile sont restées fermées aujourd’hui pour éviter une panique prévisible. L’impasse donc… A moins qu’un sauveur inattendu ne se présente. Ce « sauveur », c’est la toute puissante compagnie gazière russe, Gazprom.

Cette aide, on s’en doute, est loin d’être gratuite.

Le géant du gaz « échangerait » son soutien (qui serait apportée via le fond de pension du groupe, Gazprombank) contre un permis d’exploration des gisements gaziers offshores chypriotes. Des gisements totalement inexploités à l’heure actuelle mais extrêmement prometteurs selon les experts.

Par ailleurs, cette solution permettrait aux grandes fortunes des oligarques russes, qui détiennent 31 milliards de dollars d’actifs dans les banques de l’ile, d’économiser les 3,1 milliards que la taxe sur les dépôts bancaires prévue par le plan de sauvetage européen leur couterait.

Pourquoi une entreprise privée se soucierait des riches « épargnants » russes ? Car l’étroite imbrication entre le Kremlin, les oligarques russes et Gazprom est un secret de polichinelle.

Si ce plan de sauvetage made in Moscou était mis en œuvre, ce qui est très loin d’être fait, cela créerait en Europe un imbroglio géopolitique que le Vieux Continent n’a pas connu depuis des années.

Le premier problème posé est bien entendu d’ordre politique. Le sauvetage d’un membre de la zone euro par la Russie après le rejet par le pays de la solution européenne créerait pour l’UE une irrémédiable crise de légitimité et de conscience. Une situation parfaitement inacceptable, à tel point de Berlin a confirmé que Mme Merkel avait prévenu Nicosie que toute solution hors du cadre de l’Europe et du FMI « ne devait pas être considérée ».

D’un point de vue géopolitique, la situation serait inédite depuis 1991 : un pays d’Europe arraché à la sphère d’influence de l’UE pour rejoindre celle de Moscou ! Car il s’agit bien de sphère d’influence : il est clair qu’un tel accord donnerait au Kremlin un pouvoir considérable sur la petite île méditerranéenne. La Russie aurait un pied dans les  « mers chaudes », la marotte géopolitique des dirigeants russes depuis la tsarine Catherine II…

Remarquons enfin que le privilège accordé à Gazprom ne manquerait pas de mécontenter Washington. Nicosie avait en effet pensé privilégier des compagnies américaines pour la mise en valeur de ses ressources gazières. Les Etats-Unis étaient un partenaire assez puissant pour permettre à Chypre d’éloigner l’ennemi intime turc, qui revendique le gisement.

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