Les Jeux Européens, un moyen de reconnaissance pour Bakou ?
A grand renfort de publicité, l’Azerbaïdjan va être au centre de l’attention durant une quinzaine de jours en tant qu’organisateur des premiers Jeux Européens. Au-delà d’user du sport comme instrument du soft power, que recherche véritablement le petit Etat du Caucase ?
L’Azerbaïdjan est devenu véritablement un « Qatar du Caucase », faisant de l’organisation d’événements sportifs un instrument de reconnaissance planétaire. Cette première édition des Jeux Européens, appelés à devenir de véritables Jeux olympiques continentaux, n’est que la première manifestation de cette diplomatie sportive. Suivront un Grand Prix de Formule 1 en 2016 et quelques matchs de l’Euro 2020 de football. Comme le Qatar, les investissements massifs nécessaires à cette tenue d’événements ont été permis par la croissance exponentielle des revenus pétroliers ces dernières années, et offrent ici un moyen de diversification possible pour le petit Etat.
Niché entre deux espaces de plus en plus opposés (Europe et Russie), l’Azerbaïdjan cherche à montrer qu’il n’est pas inféodé à Moscou et est prêt à se rapprocher de plus en plus de l’Ouest. Pays majoritairement musulman (l’islam n’étant pas cependant pas religion d’Etat), il reste l’objet de critiques classiques sur le respect de la démocratie et des droits de l’homme. Ainsi, comme pour beaucoup d’autres événements sportifs, il sera intéressant de voir si l’afflux de touristes, et plus généralement d’intérêt pour l’Azerbaïdjan, générera une plus grande ouverture du régime. Le pays a fait de cet événement la pierre angulaire de sa stratégie de reconnaissance internationale, et il y a fort à parier que des dérapages budgétaires interviendront afin d’assurer une parfaite tenue de ces Jeux.
L’Azerbaïdjan, un futur jouet de l’opposition russo-européenne comme l’Ukraine ?
Cependant, c’est bien la « big picture » qui doit retenir notre attention. En pleine opposition avec la Russie, ces Jeux interviennent au parfait moment pour une Europe désireuse de trouver des alternatives aux importations énergétiques venues de Russie. L’Azerbaïdjan est un acteur majeur du gazoduc trans-adriatique (TAP en anglais), puisque le gaz azéri est directement exporté vers l’Italie. De la réussite de ce projet dépend évidemment l’avenir du pays, et plus globalement d’une mise en place réelle d’une politique énergétique continentale (en parallèle avec le projet Nabucco, évitant lui aussi la Russie).
Néanmoins, restons prudents : les derniers exemples d’organisation d’événements sportifs en Europe n’ont guère servi les intérêts diplomatiques du pays hôte. En 2012, l’Ukraine co-accueillit l’Euro de football et était alors en pleine réflexion sur une future accession à l’UE. On sait ce qu’il advint du destin ukrainien deux ans plus tard… Pour l’Azerbaïdjan, un réel rapprochement avec l’UE demeure hypothétique sans net progrès des Azéris sur le thème des droits de l’homme. Enfin, le pays espère toujours vainement une résolution diplomatique de son conflit frontalier avec l’Arménie (région du Karabakh). Etre plus reconnu à l’échelle internationale fera-t-il réellement pencher la faveur en fonction de l’Azerbaïdjan ? Cela reste hautement hypothétique !