La désignation des pays hôtes des prochaines coupes du monde, ou comment la géopolitique prend le pas sur le football
Brésil, Russie, Qatar : voilà les trois prochains pays hôtes des Coupes du monde de football, en 2014, 2018 et 2022. Pour beaucoup de fans, la dernière désignation s’avère être un désastre footballistique. Mais ce qu’ils ne comprennent pas, c’est que les intérêts économiques et politiques ont largement dominé quant à la désignation de ces trois pays. Pour la Russie, c’était un non-sens historique que celle-ci n’ait jamais accueilli cette grande compétition. La Russie européenne ne pouvait être flouée une nouvelle fois. La solidité du dossier, accompagnée des tricheries britanniques ont facilité sa tâche.
Mais pour le Qatar, de nombreuses questions se posent. Comment un si petit Etat pourra-t-il accueillir des centaines de millions de supporters étrangers ? Comment rassembler, sur un si petit territoire, une dizaine de stades, sans trop engorger la circulation ? Et comment, surtout, faire confiance à une croissance aussi artificielle, alors même que tout le monde, au Moyen-Orient, raisonne à court terme (voire à très court terme) ? Qui sait ce que sera le Qatar dans douze ans, lui qui est situé juste en face d’un pays actuellement très menaçant, l’Iran ?
Cependant, malgré leurs tailles respectives, on constate de fortes similarités entre les deux pays. Grande dépendance aux hydrocarbures (la Russie est le deuxième producteur de pétrole, le Qatar possède le plus grand gisement gazier, celui de South Pars), démocratie aux abonnés absents. Mais les deux joueront leur va-tout dans quelques années : il en va de la confiance du monde entier. Leur défi est pharaonique, notamment compte tenu des climats respectifs, tous les deux très difficiles en plein été.
Les fans se plaindront donc du choix du Qatar surtout (qu’est-ce qu’il y aura à visiter au Qatar, à part le désert ?). Mais pour ce petit pays, c’est un moyen de rattraper le déficit sportif, vis-à-vis des émirats voisins (déjà à la pointe en Formule 1, tennis…). On ne voit pas comment les Etats-Unis, principaux rivaux du Qatar pour 2022, auraient pu dépenser quatre milliards de dollars (comme le fera le Qatar), sans critique de la population. C’est donc la victoire du business sur le sportif. Mais c’est surtout la prise de conscience que le monde se lève à l’Est (la Chine pourrait bien rejoindre deux autres pays du BRIC en accueillant la Coupe du Monde 2026…), alors que le sport est né à l’Ouest. Mais ces deux pays devront néanmoins montrer un beau visage aux étrangers, et cela passe, notamment, par un arrêt de certaines restrictions aux frontières (nécessité des visas, interdiction aux Israéliens de pénétrer au Qatar). Et les fans pourront enfin éviter de parler de Katar, de Quatar, mais bien de Qatar !