Les relations franco-turques au plus bas
C’est ce que beaucoup appellent un « calcul électoraliste ». Il faut dire que, à quelques mois d’une élection présidentielle indécise, chaque vote risque de peser lourd dans la balance. Et Nicolas Sarkozy le sait.
Il l’avait promis en 2007 à une communauté arménienne estimée à 500 000 personnes en France. Nicolas Sarkozy, via une proposition de loi de l’UMP, l’a fait : ce jeudi 22 décembre, l’Assemblée nationale a voté une loi pénalisant la négation du génocide arménien de 1915 d’un an de prison et de 45 000€ d’amende. Si le texte a été largement adopté, celui-ci doit encore être soumis à l’approbation du Sénat, ce qui devrait prendre plusieurs mois. Rappelons que l’Arménie revendique près d’un million et demi de morts durant cet épisode, ce que conteste avec virulence la Turquie, qui estime que les 300 à 500 000 morts arméniens sont une conséquence de la Seconde Guerre mondiale.
François Hollande, candidat socialiste à la présidentielle, à de son côté dénoncé une opération électoraliste, en indiquant que cette loi était attendue depuis cinq ans par les Arméniens de France : « Pourquoi a-t-on perdu cinq ans ? Pourquoi le président de la République se réveille-t-il, si je puis dire, à la fin de son mandat ? Poser la question, c’est y répondre : c’est une opération électorale ».
Réactions immédiates d’Ankara
Surtout, la Turquie a mal pris cette mesure votée aujourd’hui. Et dire cela est un doux euphémisme, puisque la Turquie, par l’intermédiaire de son Premier Ministre, Recep Tayyip Erdogan, a annoncé le rappel de son ambassadeur à Paris. Ankara a également annoncé la suspension immédiate de toutes les coopérations politique, militaire et économique avec la France. Si Alain Juppé, Ministre des Affaires étrangères français, a appelé la Turquie à ne pas surréagir, plusieurs milliers de manifestants s’étaient rassemblé devant le Palais Bourbon aujourd’hui.
Si le Ministre arménien des Affaires étrangères a tenu à « exprimer [sa] gratitude aux plus hautes autorités de la France, à l’Assemblée nationale et au peuple français », il n’en demeure pas moins qu’il est délicat de contrarier la Turquie, plateforme indispensable de l’OTAN au Moyen-Orient. La Turquie s’était, il y a quelques mois, froissée avec Israël. Cet accrochage avec la France pourrait un peu plus éloigner la Turquie d’Erdogan de l’Occident, ce qui est un risque non négligeable tant le rôle stabilisateur de la Turquie est important dans la région.