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Le voile de retour au Parlement Turc : vers une islamisation latente ?

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Après environ 14 ans d’absence, le voile islamique fait son grand retour au Parlement d’Ankara. Quatre députées se sont présentées à la séance du Jeudi 31 Octobre 2013 avec un foulard couvrant leurs têtes. A l’époque, la contrevenante avait provoqué un tollé, se faisant exclure de la séance. Après 10 ans au pouvoir,  l’AKP, le parti conservateur de Recep Tayyip Erdogan, a considérablement infléchi la politique presque laïcarde de la Turquie qui prévalait jusqu’ici. Et l’armée, jadis la garante de la laïcité en Turquie, a été mise au pas ces dernières années, laissant ainsi le champ libre aux partis politiques pour définir la destinée de du pays et ce, quelle que soit leur obédience.

C’est une mini-révolution qui s’est opérée au Parlement Turc. Traditionnellement acquis à l’immense majorité à la laïcité kémaliste dans les lieux de décision politique, celui-ci n’a pas protesté outre mesure, signe que les 10 ans de pouvoir de l’AKP semblent avoir amoindri la part laïque de l’héritage du Père de la Nation. Cette évolution, très mal perçue par les partis politiques d’opposition qui dénoncent « une exploitation de la religion par l’AKP » et qui craignent des pratiques visant à « éliminer le principe de la laïcité », peut néanmoins être vue comme un retour à la normale dans un pays musulman. Du moins est-elle présentée comme un droit fondamental de la liberté d’expression individuelle.

Toutefois, ces actes font partie des symboles, comme la surtaxe imposée sur l’alcool, qui suscitent bien des interrogations sur les intentions de l’AKP pour la Turquie dans son ensemble. Si Erdogan jouit d’une forte popularité dans son pays (il est la personnalité politique préférée de 40,8% des Turcs en septembre 2013 selon une étude de MetroPOLL), il a récemment été fortement chahuté au sujet du parc Gezi, parc qui devait être rasé au profit d’un centre commercial et qui a servi de symbole de la lutte contre l’autoritarisme croissant du Premier ministre. La mise au pas de l’armée ainsi que la très relative liberté de la presse (sur les 232 journalistes en prison recensés en 2012 par le Comité pour la protection des journalistes[1], 49 étaient détenus en Turquie, plus qu’en Chine ou qu’en Iran) ne parlent pas davantage en faveur de la politique du gouvernement.

Erdogan montre un visage de plus en plus inquiétant pour ses opposants – et pour les européens

Plus le temps passe, plus les positions d’Erdogan sont ambivalentes. Animé d’un nationalisme évident, comme le prouve sa volonté d’intervention militaire en Syrie pour sécuriser ses frontières, le Premier ministre Turc semble également militer pour un retour d’un Islam bien visible dans le quotidien de ses concitoyens. C’est bien le souci que pose le port du voile au Parlement : sous couvert de vouloir réaffirmer une liberté pour certaines femmes qui désirent se vêtir ainsi, il semble surtout être le premier pas vers une obligation pour toutes dans un futur proche. Cela risque d’éloigner un peu plus la Turquie de ses partenaires européens dans l’optique de son intégration à l’Union, ce qui pourrait très bien faciliter son entrée dans une spirale anti-démocratique. A l’Europe aussi de ne pas rester passive et d’agir pour garder un partenaire fiable à l’avenir.



[1] http://www.cpj.org/imprisoned/2012.php

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